1. Les effets d'une mutation du système de production
a. La mort de la classe ouvrière
Le passage d'une économie industrielle à une
économie tertiarisée, au cours des Trente
Glorieuses, s'est accompagné d'une lente
dégradation des effectifs ouvriers. Cette tendance s'est
renforcée au cours des années 1980-1990, avec
le développement de nouvelles formes de production
privilégiant une approche technologique. Ainsi, les
ouvriers représentaient 69 % des effectifs du
constructeur automobile Renault en 1978, ils ne
représentaient plus que 48 % en 1993 et moins de
45 % en 2000. De plus, dans l'intervalle, les effectifs
de l'entreprise ont été divisés par
deux : 109 000 salariés en 1978, moins
de 50 000 en 2000, tant et si bien que les ouvriers
représentaient 75 000 personnes en 1978,
contre 22 500 personnes en 2000. Toutes les
entreprises industrielles des pays développés ont
connu des évolutions semblables.
b. Le triomphe des classes moyennes
Le rapport au travail a été profondément
transformé par la révolution numérique (que
ce soit l'irruption des machines commandées
numériquement ou celle de l'informatique). Nombre
d'emplois non qualifiés ont disparu
irrémédiablement au profit d'emplois
intermédiaires : employés, techniciens, cadres
moyens. La massification de l'enseignement secondaire, suivie de
celle de l'enseignement supérieur, dans tous les pays
développés a consacré le triomphe de la
classe moyenne qui représente désormais les
trois-quarts de la population des pays développés.
Mais ce triomphe n'est pas sans poser de redoutables
problèmes : dans la plupart des pays occidentaux, les
mécanismes d'ascension sociale sont bloqués et le
système éducatif peine à satisfaire des
aspirations sociales croissantes. En effet, si l'on a
assisté à la montée de la part des emplois
intermédiaires – et donc des classes moyennes
–, cette montée s'est faite sur des effectifs bruts
en diminution : chez Renault, les personnels
intermédiaires représentaient 27 % des
109 000 salariés de 1978 (soit
29 000 personnes) et 45 % des
50 000 salariés de 2000 (soit
22 500 personnes).
2. Les effets de la globalisation
a. Les paradoxes de l'ère de la communication et des
loisirs
La révolution numérique a connu ses effets les plus
spectaculaires dans le domaine des communications, avec le
développement de la télévision
numérique, de l'informatique et d'Internet. Plus que
jamais, le monde forme un véritable village global
où l'immédiateté de l'information est sans
doute l'un des faits les plus marquants, avec la montée
des loisirs. Les gains de productivité permis par
l'automatisation des tâches, que ce soit dans les
transports, le commerce, la banque, les services de gestion des
entreprises ou les administrations, ouvrent la voie à une
nouvelle réduction du temps de travail. En effet, pour la
première fois depuis un siècle, les
économies industrialisées se trouvent
confrontées à une situation inédite :
le développement de l'activité économique ne
se traduit plus forcément par une augmentation de
l'emploi.
b. Les écarts entre pays s'accroissent
Mais l'effet le plus sensible de la globalisation est
l'accroissement des écarts entre pays riches et pays
pauvres. La suppression des entraves au commerce international,
loin de permettre aux pays pauvres – aux faibles
coûts de main-d'oeuvre – de développer leurs
exportations, permet surtout aux pays industrialisés de
concurrencer les industries et services naissants dans les pays
émergents. Ainsi, en Amérique latine, l'Argentine
– considérée à la fin des
années 1980 comme un modèle de
développement – s'enfonce dix années plus
tard dans une crise considérable et voit son
économie totalement dollarisée.
De plus, selon le PNUD (Programme des Nations-Unies pour le
Développement), dans une centaine de pays, le revenu par
habitant est plus bas à la fin des années 1990
qu'au début des années 1980. En clair,
1,5 milliard de personnes vivent plus mal en 2000
qu'en 1980.
L'essentiel
La crise économique des années 1970-1980 a
considérablement fait évoluer les
sociétés des pays industrialisés. Prenant
l'apparence d'une crise de mutation du système de
production, elle a permis à la fois le triomphe des
classes moyennes et ouvert la voie à la globalisation,
une globalisation dont un tiers de l'humanité doit
porter le poids.