1. Le maintien d'une croissance des PIB
a. Des rythmes plus faibles
Malgré son caractère spectaculaire, la crise du
début des années 1970 n'a pas pris le
caractère de catastrophe de celle des
années 1930. Brisée, la croissance se poursuit
malgré tout, mais à des rythmes plus faibles.
Ainsi, le taux moyen annuel de croissance du PIB des pays de
l'OCDE est passé de 5 % pour la
période 1962-1973 à 2,5 % pour la
période 1974-1987. Malgré une expansion
réelle à la fin de la décennie 1990,
l'ensemble de la décennie écoulée ne se
caractérise pas par un taux de croissance moyen plus
élevé. Il faut noter que ce taux annuel moyen de
l'ordre de 2,5 % correspond à un taux relativement
proche de celui enregistré durant la révolution
industrielle et que, par ailleurs, il varie fortement selon les
pays industrialisés : au cours de la dernière
décennie, le Japon s'est caractérisé par une
réelle langueur alors que les Etats-Unis connaissaient
huit années de croissance ininterrompue.
b. Des rythmes plus erratiques
Certains événements ont pu faire croire
malgré tout, parfois, à une sortie du tunnel,
à une fin de crise. Ce furent les périodes de
reprise économique, comme 1976, 1984 ou
encore 1988 et, plus récemment, la reprise de la fin
des années 1990. La seule année 1988 a
ainsi vu le PIB français croître de 4,3 % mais
les années suivantes ont été plus
douloureuses, notamment avec la récession qui suivit la
guerre du Golfe. D'une façon générale, le
maintien d'un chômage élevé, le déclin
de l'investissement productif (au profit de l'investissement
purement financier) et l'inefficacité relative de
l'ensemble des politiques économiques montrent assez que
la plupart des économies ne sont pas sorties de la grande
dépression.
2. Le maintien de la croissance des niveaux de vie
a. Le maintien du pouvoir d'achat des ménages
La crise n'est pas non plus une catastrophe dans la mesure
où le pouvoir d'achat des ménages a
été, sauf exception, maintenu. Certes, la
croissance du revenu disponible a été ralentie, en
raison des prélèvements sociaux croissants, mais,
dans l'ensemble, il n'y a pas eu de recul. Même les
catégories fortement et traditionnellement revendicatrices
(paysans, pêcheurs, professions libérales) n'ont pas
vu leur pouvoir d'achat reculer, du moins jusqu'à la fin
des années 1980. La décennie 1980 a
ouvert une période plus difficile pour certaines
catégories sociales. En effet, c'est à partir
de 1982-1983 que les différents pays
industrialisés se sont mis à suivre des politiques
de déflation, également appelées
monétaristes. Or l'inflation, en tant qu'elle diminuait
mécaniquement les charges financières des
ménages et des entreprises, était un puissant
facteur de maintien du pouvoir d'achat des ménages.
b. Le paradoxe des années 1990
On assiste même à un paradoxe pour le citoyen
moyen : le pouvoir d'achat des ménages a plus
augmenté quand l'inflation était
élevée que lorsqu'elle s'est ralentie. Ainsi, ce
n'est qu'à partir du moment où l'inflation a
été durablement jugulée que le pouvoir
d'achat des ménages a cessé de croître.
L'exemple de la France est significatif : engagé dans
une politique de « désinflation
compétitive » depuis 1984, le pouvoir
d'achat des Français (hormis certaines catégories
privilégiées) a stagné, voire baissé
certaines années, ce qui n'était pas arrivé
depuis la fin du second conflit mondial. De ce point de vue, il
est difficile de comparer la dépression des
années 1970-1980 avec la crise des
années 1930.
Les niveaux de vie sont maintenus globalement
(c'est-à-dire pas forcément au niveau des
individus mais des différentes catégories
sociales) par le versement de prestations sociales accrues et
le développement du travail au noir (l'une des formes de
l'économie souterraine. Une autre forme est le
« bizness » – larcins, trafics
divers – qui, toujours avec les prestations sociales,
permettent aux cités d'obtenir les flux financiers
nécessaires à la survie économique d'une
partie de leurs populations). Ce maintien global des niveaux de
vie permet de maintenir, voire de développer la demande
(par la consommation des ménages) et donc de surfer sur
une croissance ralentie. C'est une façon de limiter les
effets de la crise économique et sociale.
L'essentiel
L'irruption de la crise économique, au début des
années 1970, n'a pas signifié, pour les pays
industrialisés, une dépression comparable
à celle des années 1930. Effectivement, le
maintien d'une croissance des PIB des pays
industrialisés ainsi que de la croissance des niveaux de
vie a montré que, malgré la crise, il
était possible de connaître une croissance
économique.