La censure de la presse
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Objectif : La Première Guerre
mondiale apparaît souvent comme une période noire
pour une presse soumise aux effets d’une censure implacable
mais aussi championne du « bourrage de
crâne ». Qu’en est-il exactement ?
1. Un état d’exception pour la presse
a. La mise en place de la censure
La censure est mise en place dès les premiers jours du
conflit, en août 1914. En
France, le ministère de la Guerre crée le Bureau de
presse chargé de viser les informations militaires avant
diffusion. Toutes les dispositions de la
loi de juillet 1881 concernant la liberté de la
presse sont suspendues et les journaux sont officiellement mis
« à la disposition de l’autorité
militaire ».
La censure est facilement acceptée en ce début de conflit. Nombreux sont ceux qui considèrent que la presse doit être un « organe de la défense nationale ». C’est par exemple l’avis de Jean Dupuy, propriétaire du Petit Parisien, le plus fort tirage des quotidiens de l’époque (supérieur à un million d’exemplaires).
Concrètement, les épreuves des journaux sont lues par les censeurs avant impression. Ces derniers signalent les textes interdits qui doivent alors être coupés, ce qui laisse un blanc à la place de l’article supprimé. Les journaux ne respectant pas les consignes des censeurs peuvent être saisis. C’est le cas du Petit Parisien, en janvier 1916, après la diffusion d’une nouvelle interdite concernant le front balkanique.
b. Les évolutions
La guerre s’éternisant, la censure (surnommée
Anastasie) se fait plus stricte et est de
moins en moins bien supportée par les journalistes. Ces
derniers n’ont pas accès au front et les journaux
doivent se contenter des informations (toujours optimistes)
transmises par l’autorité militaire.
Le moral des Français fléchissant, les militaires décident, à partir de la fin 1916, d’utiliser les reporters pour rendre espoir à la population. De rares journalistes sont alors autorisés à se rendre sur le théâtre des opérations. Mais ils ne peuvent dépasser les secondes lignes et le contrôle de l’armée sur leur travail est total.
Si la censure a été fortement critiquée, si sa sévérité tatillonne a été souvent dénoncée, il faut remarquer qu’elle a aussi permis de rendre la guerre plus supportable aux civils (en masquant les horreurs du conflit) et de maintenir l’espérance pendant les quatre années d’affrontement.
2. Le « bourrage de crâne » et ses
conséquences
a. Le « bourrage de crâne »
Dès le début de la guerre, la presse tente de
soutenir le moral des populations en présentant les
événements sous un jour optimiste. Les premiers
mois du conflit notamment sont fertiles en
« bobards » et autres fausses nouvelles,
même si, par la suite, sous l’influence de la
censure, le nombre des
« canards » va aller en
s’amenuisant.
L’empereur d’Allemagne Guillaume II et son fils, le Konprinz, deviennent par exemple les têtes de turc d’un certain journalisme. Selon les gazettes, le premier est touché par de terribles maladies « dissimulées au peuple allemand » : cancer de la gorge, tumeur au cerveau… Il est pourtant toujours bien vivant à l’issue du conflit.
Autre « bobard » passé à la postérité : l’article publié dans L’Intransigeant qui affirme que « les balles allemandes ne sont pas dangereuses » et qu’ « elles traversent les chairs de part en part sans faire aucune déchirure ».
b. Les conséquences
En réaction à la censure et à la
désinformation, une presse
parallèle voit alors le jour, à
l’image du Canard Enchaîné
(qui paraît pour la première fois en 1916 sous
le nom de Canard Déchaîné) ou
encore du Crapouillot (nom d’un petit mortier de
tranchée) dont l’objectif avoué est de
combattre le « bourrage de crâne ».
Parmi les quotidiens qui dénoncent la censure, on peut
également citer L’Œuvre de
Gustave Théry ou encore Le Journal
du peuple dirigé par Henri Fabre.
Plus généralement, la Grande Guerre provoque une immense méfiance vis-à-vis de la presse. Les soldats ne retrouvent rien de leurs préoccupations et de leur quotidien dans les journaux et ils ne manquent pas, quand ils reviennent du front, de souligner ce décalage et de dénoncer les mensonges véhiculés par les journaux.
L’opinion publique prend ainsi peu à peu conscience de la manipulation dont elle a été victime au nom de la patrie. D’où une perte de confiance du public dans la presse écrite qui expliquerait, en partie, les progrès fulgurants de la radio dans les années d’après-guerre.
L’essentiel
La censure de la presse est mise en place dès les premiers jours du conflit, en août 1914. Les publications ne respectant pas les consignes des censeurs peuvent être saisies. Jusque fin 1916, les journalistes n’ont pas accès au front et ils doivent se contenter des informations transmises par l’autorité militaire. Privés d’informations vérifiables, désireux de soutenir le moral des populations, les journaux deviennent fertiles en « bobards » et autres fausses nouvelles. Ce « bourrage de crâne » jette un discrédit durable sur la presse écrite.
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