1. Le prétexte : la mission civilisatrice
Influencés par des « sciences » nouvelles
(comme le « racisme scientifique »
théorisé entre autres par le français
Gobineau : Essai sur
l’inégalité des races humaines, 1853) et
par une incontestable supériorité technologique,
les Européens sont persuadés de la
supériorité de leur civilisation.
Des ouvrages tentent ainsi de démontrer les
inégalités de race avec la race blanche
(indo-européenne) au sommet de la pyramide de
l'intelligence et du développement (ces idées sont
tellement communes que même des articles de dictionnaire
comme ceux du Larousse reproduisent ces idées).
Certains européens évoquent alors la
nécessité de transmettre cette
« lumière » de civilisation pour les
pays restés « dans les
ténèbres ». L'économiste Paul
Leroy-Beaulieu écrit ainsi en 1889 que les non-occidentaux
sont de « vrais enfants débiles » ;
Rudyard Kipling parle lui de « fardeau de l'homme blanc
». Quel serait ce fardeau ? Apporter les
progrès scientifiques, culturels, médicaux,
économiques à des pays ou des régions qui ne
les connaissent pas. Certains occidentaux croient
réellement à cette mission : on peut citer
l'exemple du docteur Albert Schweitzer, médecin alsacien
qui fonde un hôpital à Lambaréné en
1913 (prix Nobel de la paix en 1952). Mais dans la plupart des
cas, cet argument civilisateur est surtout un moyen de se donner
bonne conscience.
2. La pression démographique et économique
Dans les années 1830, l'Europe entre dans la
transition démographique. La population augmente
alors considérablement (elle double quasiment pendant le
XIX
e siècle). Ce phénomène a deux
conséquences : l’émigration vers les
« pays neufs » (États-Unis,
Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, etc. : plus de
quarante millions d’Européens font ce type de voyage
de 1800 à 1913) et une volonté d’expansion
territoriale. L’Europe est aussi la
première
puissance économique mondiale. C'est le continent
qui a connu en premier l'industrialisation. Face à des
marchés qui saturent, les usines européennes
cherchent de nouveaux débouchés et des
matières premières pour leurs produits.
Coloniser est donc aussi un moyen de
renforcer la puissance et le dynamisme économique
du pays.
3. Des rivalités nationales en Europe
La colonisation s'inscrit aussi dans un
contexte
nationaliste. C’est tout à fait visible lors
de la course vers les colonies qui s'engage entre les puissances
européennes dans les années 1870, surtout en Afrique.
En France par exemple, les colonies vont être vues comme un
moyen de compenser la perte de l'Alsace-Lorraine. L'Angleterre
trouve un élément de puissance politique et
économique indéniable dans son immense empire. Les
pays européens partis plus tard dans la colonisation vont
aussi réclamer comme le dit l'Allemagne « une place au
soleil ». Certains territoires vont faire parfois
l’objet d’une lutte féroce entre
Européens (le contrôle de Fachoda, modeste poste
militaire au Soudan, entraîne presque la France et
l’Angleterre dans une guerre en 1899).
4. Une époque de découvertes et de mission
L'époque voit aussi fleurir partout en Europe des
sociétés de géographie qui
s'intéressent au monde. Les
missions
d'exploration sont nombreuses (Stanley et Livingstone pour
les sources du Nil par exemple) et
chaque découverte
contribue à asseoir le prestige de l'État qui en est
l'auteur. L'Afrique est ainsi traversée de part et
d’autre par des missions d'exploration ; c'est aussi le
cas des zones polaires. L'Eglise enfin, voit dans ces nouveaux
territoires un vivier d’âmes à convertir
(surtout par rapport à une Europe qui se
déchristianise). Il y a ainsi de nombreuses missions de
conversion des peuples africains menées par des catholiques
ou des protestants. Historiquement, ces missions ont parfois
précédé les explorations.
L’essentiel
Les Européens justifient la colonisation par le souci de
diffuser leur civilisation qu’ils considèrent comme
supérieure au reste du monde.
Mais les causes du fait colonial sont en fait très
diverses : économiques (recherche de
débouchés et de matières premières),
religieuses (convertir de nouveaux chrétiens),
démographiques et surtout politiques (concurrence entre
les nations).