L'expérimental
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Objectif :
Elaborer une réflexion sur les enjeux du montage dans
le cinéma expérimental.
Le cinéma expérimental détient une
dimension critique essentielle, il remet en
question les codes et les conventions du
cinéma industriel, à commencer par son
dispositif.
La caméra n'est plus indispensable, l'équipe travaille directement sur la pellicule, la peint, la griffe. L'écran peut être supprimé ou multiplié, la salle de cinéma en vient à devenir la scène de diverses performances. De nouveaux usages surviennent : la vidéo, la télévision. On expérimente comme dans un laboratoire, on pense à projeter le film dans des lieux innovants (musées etc.). Ce cinéma est illimité formellement, ses lieux de tournages foisonnent, ses objectifs sont rehaussés. Il s'impose autant dans l'avant-garde française des années 1920 que dans celle de 1940 aux Etats-Unis, et on le rencontre aussi dans l'underground des années 1960.
Il se diffuse dans plusieurs mouvements (le lettrisme, Fluxus, Zanzibar dont est issu Philippe Garrel, par exemple), il se met au service d'expériences artistiques (Dada, le surréalisme).
Grâce à lui, des réflexions sur le corps (Maria Klonaris et Katherina Thomadaki), sur le récit (Marcel Hanoun), sur l'abstraction (Oskar Fischinger) ou sur la forme (Chris Marker, Richard Fleischer, Marguerite Duras) éclosent. Des ambitions scientifiques l'utilisent par ailleurs (Paul Painlevé).
La caméra n'est plus indispensable, l'équipe travaille directement sur la pellicule, la peint, la griffe. L'écran peut être supprimé ou multiplié, la salle de cinéma en vient à devenir la scène de diverses performances. De nouveaux usages surviennent : la vidéo, la télévision. On expérimente comme dans un laboratoire, on pense à projeter le film dans des lieux innovants (musées etc.). Ce cinéma est illimité formellement, ses lieux de tournages foisonnent, ses objectifs sont rehaussés. Il s'impose autant dans l'avant-garde française des années 1920 que dans celle de 1940 aux Etats-Unis, et on le rencontre aussi dans l'underground des années 1960.
Il se diffuse dans plusieurs mouvements (le lettrisme, Fluxus, Zanzibar dont est issu Philippe Garrel, par exemple), il se met au service d'expériences artistiques (Dada, le surréalisme).
Grâce à lui, des réflexions sur le corps (Maria Klonaris et Katherina Thomadaki), sur le récit (Marcel Hanoun), sur l'abstraction (Oskar Fischinger) ou sur la forme (Chris Marker, Richard Fleischer, Marguerite Duras) éclosent. Des ambitions scientifiques l'utilisent par ailleurs (Paul Painlevé).
1. Maya Deren
Maya Deren est née à Kiev à 1917, elle
commence ses études en Suisse et les finit à
New York (où elle est diplômée en
arts). Figure importante du cinéma
expérimental, son œuvre est proche du
surréalisme par la structure de ses films
et leur profonde orientation
symbolique et onirique. Le corps et la danse y
occupent une place centrale. Jonas Mekas sera partiellement
gêné par l'excès d'esthétisme et
de significations mystérieuses.
Si cette double dimension onirique et chorégraphique est renforcée par la mise en scène des corps et la virtuosité des danseurs, le montage y joue un rôle majeur.
« Meshes of the afternoon » (1943) dispose d'un montage en boucle de séquences presque identiques. On retrouve les mêmes lieux traversés par la même femme (incarnée par Maya Deren) : une allée, le pallier d'une maison, une salle, un escalier, une chambre. Le montage assure une circularité angoissante dont le personnage est prisonnier. Les escaliers et la clef qui apparaissent dans ce film sont par ailleurs des stéréotypes symboliques qui nourrissent largement sa substance onirique.
Dans d'autres productions, le montage assure le passage de personnages entre des lieux hétérogènes tout en ménageant une certaine fluidité. Ces passages irréels sont assurés par des raccords exemplaires. C'est le cas dans « At Land »(1944) où Maya Deren est expulsée de la mer, traverse la plage, se hisse en haut d'une souche où elle atteint une table autour de laquelle dînent des convives (ce passage est pris en charge par un raccord spatial, elle sort du cadre par le haut, au sommet de la souche devenue arbre et réinvestit le plan suivant par le bas du cadre).
Les circulations de ce type reposent éventuellement sur des raccords de mouvement, comme dans « A Study in Choregraphy for Camera » (1945). Un danseur passe de lieu en lieu, il amorce un saut dans un plan et sort du cadre, puis atterrit au plan suivant dans un autre lieu. Des plans du corps en suspension viennent s'inscrire entre deux plans pour compléter le saut : le saut est dilaté, étendu, étiré en son milieu, ce qui accroît son caractère aérien.
Des substitutions de personnages sont visibles avec ce type de raccord : il traverse le cadre, poursuit son action dans le plan suivant, mais ce n'est déjà plus lui. Dans ce cinéma, on a la liberté de déplacement, de transformation qu'ont tous les personnages qui habitent les rêves.
Si cette double dimension onirique et chorégraphique est renforcée par la mise en scène des corps et la virtuosité des danseurs, le montage y joue un rôle majeur.
« Meshes of the afternoon » (1943) dispose d'un montage en boucle de séquences presque identiques. On retrouve les mêmes lieux traversés par la même femme (incarnée par Maya Deren) : une allée, le pallier d'une maison, une salle, un escalier, une chambre. Le montage assure une circularité angoissante dont le personnage est prisonnier. Les escaliers et la clef qui apparaissent dans ce film sont par ailleurs des stéréotypes symboliques qui nourrissent largement sa substance onirique.
Dans d'autres productions, le montage assure le passage de personnages entre des lieux hétérogènes tout en ménageant une certaine fluidité. Ces passages irréels sont assurés par des raccords exemplaires. C'est le cas dans « At Land »(1944) où Maya Deren est expulsée de la mer, traverse la plage, se hisse en haut d'une souche où elle atteint une table autour de laquelle dînent des convives (ce passage est pris en charge par un raccord spatial, elle sort du cadre par le haut, au sommet de la souche devenue arbre et réinvestit le plan suivant par le bas du cadre).
Les circulations de ce type reposent éventuellement sur des raccords de mouvement, comme dans « A Study in Choregraphy for Camera » (1945). Un danseur passe de lieu en lieu, il amorce un saut dans un plan et sort du cadre, puis atterrit au plan suivant dans un autre lieu. Des plans du corps en suspension viennent s'inscrire entre deux plans pour compléter le saut : le saut est dilaté, étendu, étiré en son milieu, ce qui accroît son caractère aérien.
Des substitutions de personnages sont visibles avec ce type de raccord : il traverse le cadre, poursuit son action dans le plan suivant, mais ce n'est déjà plus lui. Dans ce cinéma, on a la liberté de déplacement, de transformation qu'ont tous les personnages qui habitent les rêves.
2. Stan Brakhage
Stan Brakhage est né à Kansas City en 1933
(et décédé en 2003), il a
tourné près de 200
films figuratifs. Il s'agit parfois de
couleurs directement peintes sur la
pellicule, des couleurs qui s'enchaînent
selon de subtiles variations
chromatiques. Brakhage s'intéresse aux
sensations visuelles, indépendamment des
images représentées et identifiables (les
vibrations visuelles qui apparaissent sous les
paupières lorsqu'on ferme les yeux l'ont toujours
fasciné).
Il réalise son chef-d'œuvre en 1958 : « Anticipation of the night ». Pas de personnages, mais des silhouettes qui disparaissent aussi vite qu'elles sont apparues. Pas d'histoire, mais des lieux (une maison, un jardin, un parc d'attraction), des gestes (des passages), qui reviennent et empêchent toute progression.
L'essentiel de son travail émerge dans la valeur plastique, sensible et sensorielle des images, comme si leur défilement agissait directement sur le système nerveux du spectateur, sans passer par un jugement raisonnable.
Dans ses films, Stan Brakhage pratique le « plastic cutting », c'est-à-dire un montage qui consiste à coller des plans qui se ressemblent d'un point de vue formel, presque énergétique (mouvement violent, gros plan etc.). Ce ne sont pas des raccords que l'on voit mais des raccords que l'on sent, ils peuvent aussi être imperceptibles et transparents.
Il réalise son chef-d'œuvre en 1958 : « Anticipation of the night ». Pas de personnages, mais des silhouettes qui disparaissent aussi vite qu'elles sont apparues. Pas d'histoire, mais des lieux (une maison, un jardin, un parc d'attraction), des gestes (des passages), qui reviennent et empêchent toute progression.
L'essentiel de son travail émerge dans la valeur plastique, sensible et sensorielle des images, comme si leur défilement agissait directement sur le système nerveux du spectateur, sans passer par un jugement raisonnable.
Dans ses films, Stan Brakhage pratique le « plastic cutting », c'est-à-dire un montage qui consiste à coller des plans qui se ressemblent d'un point de vue formel, presque énergétique (mouvement violent, gros plan etc.). Ce ne sont pas des raccords que l'on voit mais des raccords que l'on sent, ils peuvent aussi être imperceptibles et transparents.
3. Quelques techniques
Dans le cinéma expérimental, le montage
devient très souvent l'objet d'expériences.
En voici quelques unes :
- Le Found Footage : utilisation d'un matériau qui préexiste au film. Il s'agit de le retravailler (le peindre, le griffer, l'associer à des images). Le montage est donc ici l'instrument d'une recréation.
- Le Cutting : découpage de pellicules afin de les recoller entre elles (utilisé par Cécilé Fontaine par exemple). La colleuse est alors inutilisable.
- Image par image : modification répétée d'infimes détails d'un photogramme à l'autre (voir Rose Lowder). Dans ce montage réalisé à partir de la caméra, l'image vibre et une espèce de souffle artificiel la traverse. Le montage n'est plus l'opération qui sépare ou suture des plans différents, elle est le lieu d'une recréation du plan lui-même.
L'essentiel
Les fonctions assignées au montage dans le
cinéma expérimental sont révisées
(la confusion peut remplacer la cohérence, le rythme
concurrencer la visibilité). Les techniques
elles-mêmes sont à réinventer.
Le montage sélectif, qui supprime de la pellicule les photogrammes inutilisables (abîmés, surexposés, tachés), n'a parfois plus lieu d'être. Un autre particularité de ce cinéma étant d'accepter, voire de favoriser tout ce qui peut ruiner la bonne forme.
Le montage sélectif, qui supprime de la pellicule les photogrammes inutilisables (abîmés, surexposés, tachés), n'a parfois plus lieu d'être. Un autre particularité de ce cinéma étant d'accepter, voire de favoriser tout ce qui peut ruiner la bonne forme.
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