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A chacun sa vérité

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Le sujet n'est pas formulé ici sous la forme d'une question, mais reprend, sous une forme affirmative, un énoncé issu de l'opinion commune, qu'il s'agit alors d'expliquer, de discuter et, le cas échéant, de critiquer. Implicitement, la question est donc ici de savoir si l'affirmation : « à chacun sa vérité », est, ou non, légitime.
1. « A chacun sa vérité» : le problème du relativisme
a. Tolérance et opinion
« A chacun sa vérité », ou encore  « à chacun son opinion », ce sont là des phrases qui relèvent assurément de l'opinion commune, qui entend suggérer par là une exigence de tolérance s'opposant à l'attitude qui consisterait à rejeter toute idée qui diffèrerait des siennes propres.

Mais ces énoncés posent problème : ils impliquent que la vérité peut être considérée comme subjective, comme essentiellement relative – chacun pouvant disposer d'une vérité qui ne serait que la sienne. Mais une vérité qui n'est vraie que pour moi est-elle encore une vérité ?

b. Le problème du relativisme
Cette difficulté a été mise en évidence par Platon qui, dans le Théétète, reprend les thèses du sophiste Protagoras : celui-ci affirmait en effet que « l'homme est mesure de toutes choses », autrement dit, que la ou plutôt les vérités dépendent des perceptions, sentiments ou opinions de chacun. Or il est vrai, par exemple, que le même vent, qui semble à l'un glacial, peut apparaître tiède à un autre, de sorte qu'il serait à la fois vrai de dire que ce même vent est glacial et, tout à la fois, qu'il est tiède.

Si la connaissance se réduit à la perception ou à l'opinion, il semble donc légitime de dire « à chacun sa vérité », puisqu'il est vrai que perception et opinion sont, par définition, subjectives et relatives. Mais le problème est précisément de savoir si une telle conception de la connaissance ou de la science peut être admise.

c. relativisme et scepticisme
Dire : « à chacun sa vérité », cela implique que l'on se contente de s'en tenir à des opinions incertaines ou à des sensations subjectives – que l'on se contente, donc, de s'en tenir à un relativisme du vrai, suivant lequel ce qui est vrai pour moi ne l'est pas nécessairement pour les autres.

Mais ce relativisme a nécessairement pour corrélat un scepticisme, aux deux sens du terme : il aboutit soit à nier la possibilité même de découvrir aucune vérité authentique, et ainsi à renoncer à tout effort ou à toute recherche théoriques ; soit à se tenir dans une simple position de questionnement ou d'examen perpétuels, sans espoir cependant d'obtenir aucune réponse assurée (suivant l'étymologie du terme « scepticisme », qui provient du grec skeptomaï : « j'examine »).

2. « A chacun sa vérité» : un énoncé illégitime
a. Un énoncé contradictoire
Plus radicalement, on pourrait dire que cet énoncé est contradictoire : dès lors que l'on affirme : « à chacun sa vérité », on affirme en réalité sans s'en rendre compte qu'il n'y a pas, au sens strict, de vérité – puisque la vérité se doit d'être universelle – ou du moins que la vérité ne saurait en aucun cas être rendue accessible aux hommes.

En d'autres termes, une vérité qui n'est que ma vérité ne saurait être une vérité au sens strict. Il serait absolument absurde, par exemple, de soutenir que chacun a sa propre définition du triangle, ou que chacun est libre de penser ce qu'il veut quant à la réalité de tel événement historique singulier.

b. Le refus des opinions relatives
Se contenter de vérités, ou plutôt d'opinions, relatives, c'est là une solution de facilité qui conduit à renoncer à toute science possible.

Tel est le propos de Descartes, qui remarque que la diversité des opinions est le signe de ce que l'on n'a encore atteint aucune connaissance certaine :
« chaque fois que sur le même sujet [deux savants] sont d'un avis différent, il est certain que l'un des deux au moins se trompe ; et même aucun d'eux, semble-t-il, ne possède la science : car si les raisons de l'un étaient certaines et évidentes, il pourrait les exposer à l'autre de telle manière qu'il finirait par le convaincre à son tour ».

Les opinions sont précisément, pour Descartes, ce que l'on doit dépasser pour accéder à la science.

3. De l'opinion à la science
a. Opinion et science
Il faut donc comprendre finalement qu'opinion et science s'opposent point par point : l'opinion est subjective, insuffisamment démontrée, et par suite incertaine, tandis que la science se doit d'être universelle, démontrée et certaine. En ce sens, la recherche d'une science ou d'une vérité authentiques doit nous amener à rejeter toute opinion, ainsi que le fait Descartes à travers l'entreprise d'un doute volontaire et radical.
b. L'opinion comme point de départ
Il n'en demeure pas moins vrai que nous commençons nécessairement par disposer seulement d'opinions incertaines : la finitude de notre condition fait que nous ne sommes point omniscients, mais relativement ignorants. C'est pourquoi les opinions relatives sont toujours pour nous, de fait, le nécessaire point de départ de toute recherche : de sorte que la réflexion et la raison ont d'abord pour rôle d'examiner, de critiquer ces opinions initiales – qui seront, alors, soit éliminées si l'on met au jour leur fausseté, soit conservées et démontrées, si elles sont susceptibles de l'être.
c. Le dialogue : opinion et vérité
C'est aussi en ce sens que le dialogue est utile : la confrontation des opinions diverses permet précisément de mettre au jour les insuffisances éventuelles de chacune, et par là de les remettre en cause.

Mais un dialogue véritable implique que chaque interlocuteur ait en vue, non point la seule défense de son opinion propre, mais l'horizon d'une vérité universelle que peut être nul d'entre eux ne détient encore – et par là même le dépassement et l'abandon de toute opinion subjective.

En ce sens, il faudrait conclure en disant que, si l'on peut légitimement dire : « à chacun son opinion », puisque toute opinion est par définition subjective, on ne saurait nullement dire de même : « à chacun sa vérité ». C'est précisément au-delà de toute opinion, et peut-être même contre toute opinion subjective, que la vérité peut seulement être découverte : « On ne peut rien fonder sur l'opinion », disait Bachelard, mais « il faut d'abord la détruire ». L'opinion est, pour la science, « le premier obstacle à surmonter ».

Pour aller plus loin

Platon, Théétète, 152 a-d : sur le relativisme de Protagoras.

Descartes, Règles pour la direction de l'esprit, III : sur le désaccord et la diversité des opinions comme signe d'ignorance. Discours de la méthode, I : sur le même point, et IV : sur la mise en œuvre du doute radical.

Bachelard, La Formation de l'esprit scientifique, 1 (Vrin, p . 14) : sur l'opinion comme « obstacle épistémologique ».

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