La communication est-elle la première fonction du langage ?
Ainsi le langage, oral ou écrit, nous apparaît d'abord comme un moyen, ou un instrument, dont la fonction est de communiquer. Mais cette première idée doit être justifiée.
Les mots sont donc bien des signes linguistiques qui ont pour fin d'extérioriser et par là de communiquer nos pensées.
– un « émetteur » ou « locuteur », qui exprime une idée ;
– un « récepteur » ou « auditeur », qui l'écoute ;
– un « référent » : ce dont on parle, les échangées ;
– un « code », la langue, que le locuteur utilise pour exprimer sa pensée.
Ainsi les échanges linguistiques sont décrits comme n'importe quel « instrument de communication » (un téléphone, par exemple, implique aussi un « émetteur » et un « récepteur » entre lesquels circulent les informations codées sous forme d'influx électriques). Et, même si les linguistes admettent que le langage peut s'utiliser à diverses fins (donner un ordre, écrire des poèmes, etc.), ils maintiennent cependant le plus souvent, comme G. Mounin, que « la fonction communicative est la fonction première, originelle et fondamentale du langage, dont toutes les autres ne sont que des aspects ou des modalités non-nécessaires ». Mais cette façon de décrire le langage ne doit-elle pas être questionnée ?
1) le langage n'est que conventionnel, de sorte qu'il ne peut jamais représenter avec exactitude nos pensées ou sentiments ;
2) les mots sont généraux, de sorte qu'ils ne disent pas ce qu'il y a de particulier dans ce que nous cherchons à exprimer.
Pour le comprendre, il suffit de se référer à la façon dont nous expérimentons le langage : quand j'écoute quelqu'un parler, je n'ai pas à m'interroger longuement pour savoir quelles pensées me sont ainsi communiquées dans les mots, je n'ai pas à « traduire » ces mots en idées ; mais le sens, les idées me sont données instantanément dans et par les paroles mêmes de l'autre.
Le langage n'est pas un instrument extérieur à nous ; par suite, il ne saurait être défini par une fonction unique – et moins que toute autre peut-être par celle qui consisterait à « communiquer ». Comment alors déterminer la nature du langage ?
Autrement dit, la pensée ne précède pas le langage ou les mots, qui ne serviraient qu'à l'extérioriser dans un second temps : mais c'est dans et par les mots qu'elle se constitue. C'est pourquoi Hegel dira que « c'est dans les mots que nous pensons », et que « vouloir penser sans les mots est une tentative insensée ».
Et le poète (dont le nom vient d'ailleurs du mot grec poïèsis, « fabrication, production, création ») est celui qui est capable de faire surgir en nos esprits des représentations de ce qui pourtant jamais n'exista ; c'est ce que tente nous faire comprendre le poète Mallarmé dans les vers suivants :
« Je dis : une fleur ! et [...] musicalement se lève, idée même et suave, l'absente de tout bouquet. » (Divagations). Écrire ou prononcer ce simple mot : « une fleur », fait surgir l'idée de cette fleur qui pourtant ne fut jamais présente en aucun bouquet auparavant rencontré.
C'est ce qu'avaient bien compris les sophistes de l'Antiquité (que critique Platon), qui font usage du langage en vue de persuader leur auditoire de l'opinion qui leur sera avantageuse, du point de vue politique ou judiciaire par exemple : l'art de bien parler, la rhétorique et la sophistique, permet d'entraîner les foules dans la direction qu'on veut bien ainsi leur imprimer.
C'est en ce sens que G. Berkeley pourra dire que « la communication des idées marquées par les mots n'est pas la seule ni la principale fin du langage, comme on le pense communément. Il y a d'autres fins, comme éveiller une passion, provoquer une action ou en détourner, mettre l'esprit dans une disposition particulière » (Principes de la connaissance humaine, Introduction, § 20).
G. Mounin, Clés pour la linguistique (Seghers, 1968, p. 79-80) : sur les multiples fonctions du langage, et leur subordination à la seule fonction de communication.
Ferdinand de Saussure, Éléments de linguistique générale.
Platon, Gorgias (463 a-466 c) : à propos de la rhétorique et de la sophistique comme arts de « flatter » et de persuader les foules.

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