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Les Planches courbes : lecture méthodique 1

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Toutes les références renvoient à l'édition suivante : Yves Bonnefoy, Les Planches courbes, édition Mercure de France, 2001, Paris. ISBN 2-7152-2298-X

Il s’agit de la troisième section du recueil qui poursuit l’évocation de souvenirs d’enfance et fait advenir un monde onirique. Cette section est construite en diptyque, c’est-à-dire que deux poèmes - de neuf et huit strophes - la composent et qu’ils correspondent à deux moments distincts : le rêve pour le poème I et le réveil pour le poème II. Nous allons nous concentrer sur la deuxième partie de ce poème qui correspond au réveil. Après avoir été plongé dans « le sommeil d’été » (p. 71), le lecteur est face au « sursaut du réveil brusque » du narrateur. Ce réveil permet d’affronter pleinement le risque de la poésie qui est aussi son fondement : la difficulté d’établir par le biais du langage un rapport authentique au monde.
 
1. Le passage : Poème IX de « La Maison natale » p.93

« Et je pourrais
Tout à l'heure, au sursaut du réveil brusque
(...)
Le premier feu à prendre au bas du monde mort. »

2. Les axes de lecture

Nous allons voir par une étude quasi linéaire comment ce poème, inscrit pourtant dans une section sur le leurre du langage, est un plaidoyer en acte et en théorie d’une poésie tournée vers le monde avec le risque assumé de « mensonge » (p. 79) que les mots comportent.

Le premier poème s’achevait sur l’oubli et l’ « indifférence du sommeil », le second s’annonce comme une suite avec la conjonction de coordination « et » mais est en fait une véritable rupture avec « le sursaut du réveil brusque » (p. 77). Les deux premières strophes évoquent une possibilité pour la poésie de se faire la voix d’un monde déchiré et du leurre de la chimère.
Le second mouvement introduit par la conjonction de coordination « mais » annule cette possibilité de traduction d’un monde inauthentique et y oppose un fervent plaidoyer pour la poésie.

  • Notons tout d’abord que la possibilité de dire un monde inauthentique est soumise au conditionnel par deux fois ( « Je pourrais » ) et mise en doute par des termes comme « dire ou tenter de dire ». Le sujet lyrique est pris entre espoir et doute : « me souvenir de ce qui est, n’être que la lucidité qui désespère ». Ce désespoir est dû à la conscience qu’ « injustice et malheur ravagent le sens / Que l’esprit a rêvé de donner au monde » et que la chimère « leurre autant la raison que le rêve ». De plus, le monde qu’il est donné de décrire est hostile « le tumulte / des griffes et des rires qui se heurtent / avec l’avidité sans joie des vies primaires » ; on remarque, à cet effet, l’emploi des sonorités en dentales [d], [t], [p] et en rugueuses [k] [r] et des assonances en [i] qui traduisent la douleur ressentie par le poète à l’évocation de ce monde. Cette forme de mimétisme sonore évolue en lamentation avec l’utilisation des sifflantes qui expriment l’inquiétude, la violence : « En somme me souvenir de ce qui est, / N’être que la lucidité qui désespère ». A ces valeurs sonores et sémantiques s’ajoutent des décalages métriques très importants : la syntaxe se répartit sur les vers, créant des effets d’enjambements, de ruptures, de retardements. Par exemple, des termes comme « griffes », « injustice » « abandonner » sont mis en valeur car le vers se poursuit sur le vers suivant. Ce procédé crée un effet d’attente, une mise en suspens du sens. C’est en cela que l’on peut dire que lecteur expérimente ici le « rebord disloqué de la parole ». Si l’esprit a rêvé de donner un sens au monde offrant « de la beauté dans la vérité », le poète se refuse pour autant à « abandonner les mots ».
  • C’est pourquoi le second mouvement débute par l’évocation d’une voix simple et confiante qui ferait de la poésie l’espoir : « Mais il me semble aussi que n’est réelle que la voix qui espère. » (p. 77). Cette évocation est tout de suite suivie d’une référence à la main, signe symbolique d’ouverture au réel et à l’autre, signe de la présence : « Réel, seul, le frémissement de la main qui touche la promesse d’une autre. » Le sujet lyrique est confiant comme en atteste l’emploi de l’expression « Je sais ».
    Ensuite, vient l’éloge de la poésie au sein d’une section sur le leurre des mots : Bonnefoy réalise ce que l’on peut nommer la défense de la poésie. Celle-ci est invocatoire et la forte adresse lyrique « ô poésie » est placée sous le signe de l’urgence : « un mot pourtant reste à me brûler les lèvre », « je ne puis m’empêcher de te nommer / par ton nom ». La poésie est personnifiée selon une tradition lyrique, le « je » lyrique s’adresse « directement » à elle et au présent tout en faisant référence à « l’éloquence des époques ». Ces époques auxquelles il est fait référence évoquent une certaine grandeur et une communion avec la nature « où l’on plaçait, la veille des jours de fête, / Au plus haut des colonnes des grandes salles, / Des guirlandes de feuilles et de fruits ».
    C’est ensuite dans la « mémoire », mère des Muses, que s’inscrit la poésie au « nom un et multiple » : « La mémoire, / Enseignant ses mots simples à ceux qui cherchent / A faire être le sens malgré l’énigme ». La poésie permet la saisie des « signes dans les images » du monde et annihile les « doutes et […] les peurs ». La poésie enfin est représentée comme offrant la possibilité de saisir le monde dans la globalité des sensations qu’il procure selon la théorie des correspondances : la poésie est l’ultime élément de connaissance puisque connaître c’est découvrir l’unité cachée sous la diversité des choses et des sensations qu’elles provoquent. C’est en ce sens que « la musique élucide / De sa flûte savante au faîte des choses / Le son de la couleur dans ce qui est ». « Ce qui est » semble se révéler pleinement par le biais de la poésie. A cette synesthésie, on peut ajouter un jeu sur les signifiés traditionnels de la poétique des éléments que reprirent les alchimistes :  l’union du feu ou de la lumière (« feu clair » p. 78, « la flamme […] le phare » p. 80) - qui peuvent correspondre à un rituel de purification-, de l’air (« un vent » p. 80) et de l’élément terrestre et liquide permet la renaissance définitive.
    La strophe suivante évoque, quant à elle, tous les reproches faits à la poésie que l’ « on […] méprise [ou] dénie » : elle est un vecteur de « mensonges » et de « fautes de langage ». La métaphore qui fait de la poésie une fontaine abreuvant d’eau « mauvaise » est emblématique d’une tradition selon laquelle la poésie est un leurre décevant qui peut conduire à la mort. Et la strophe suivante concède la dérive des images poétiques « c’est vrai que la nuit enfle les mots » ; aussi, le champ lexical du leurre est-il significatif : « enflent, tournent, rabattent, se perd, se heurtent, incohérence »
    Cependant, le risque d’un monde sans poésie sans « images » ni « livres » « grands corps chaleureux du monde », sans objet de désir est tel qu’elle semble réhabilitée. La fin du poème la transforme en étoile guidant une « barque » vers une terre d’accueil : « Devant eux, à la fin du long voyage, / la terre dans l’écume, et brillait le phare.
    La note finale est espoir, espoir que la poésie soit « la première parole après le long silence / Le premier feu à prendre au bas du monde mort. ». Le poids des mots est ici renforcé par le martèlement de l’allitération des consonnes dites dures sur lequel se clôt « Le leurre des mots ».  
Conclusion

Ainsi, l’on a pu voir que l’espoir de la poésie se maintient au plus près du réel chez Bonnefoy. L’étude générale de ce long  passage révèle une célébration critique de la poésie : le poème est situé dans l’entre-deux de cet espace instable entre « les ombres qui se resserrent » et « les arbres qui s’écartent » (p. 73). La section II du « Le leurre des mots » est donc un exemple emblématique du fait que l’acte poétique se situe dans l’intervalle entre le réel et le désir, en d’autres termes dans l’espace d’une frustration qui donne naissance à la création.

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