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Le mythe du « bon sauvage »

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Objectif
  • Montrer les sources et les ambiguïtés de ce mythe européen.
Points clés
  • La figure du « sauvage » incarne l’envers (une sorte de négatif) des sociétés occidentales dites « civilisées ».
  • Elle se construit sur trois caractéristiques : égalité, frugalité, naturalité.
  • Le « sauvage » apparait plus libre que l’homme européen, ce qui nourrit les fantasmes et les idéaux révolutionnaires.
  • Le mythe du « bon sauvage » sert également de socle pour justifier la colonisation : les autochtones sont perçus comme de grands enfants qu’ils s’agit d’éduquer, de civiliser et de faire rentrer dans le giron de la religion chrétienne.

Les récits soumettant la civilisation au regard d’un « sauvage » sont fréquents. Qu’il apparaisse sous la forme d’un Huron philosophe chez Voltaire ou sous celle d’un extraterrestre animiste dans le film Avatar de James Cameron, le sauvage est la critique incarnée, souvent mythifiée, de notre propre société. Sa franchise débusque nos hypocrisies. Sa naïveté se révèle plus sage que notre cynisme. Sa vie naturelle dénonce nos artifices. Même ses crimes paraissent bien innocents comparés aux nôtres. Tous ces lieux communs s’ancrent dans le mythe du « bon sauvage », forgé au moment où les populations autochtones du « Nouveau Monde » meurent, tuées par les conquérants et les virus venus d’Europe.

1. Aux sources du mythe

La découverte des Amériques et de leurs habitants par les Européens en 1492 ne bouleverse pas seulement notre représentation géographique du monde. Les représentations morales, politiques et religieuses européennes s’en trouvent aussi profondément affectées. La rencontre avec des peuples radicalement différents conduit d’abord à des incompréhensions. Celles-ci entrainent à leur tour l’éclosion immédiate du mythe. Ainsi le navigateur et explorateur Amerigo Vespucci (1454-1512) publie dès 1504 une lettre, Mundus Novus, qui pose les bases du mythe du « bon sauvage ». Les natifs du continent américain ignorent, d’après lui, l’usage des vêtements, la propriété privée, les hiérarchies, les interdits sexuels et la religion. Ces « sauvages » seront ainsi vus tout au long du 16e siècle comme des gens sans foi, sans loi, sans roi.

Les « sauvages » sont essentiellement caractérisés par ce qui est supposé leur manquer par rapport à nous. Le mot « sauvage » désigne celui qui habite la forêt. Ils seraient de ce fait plus proches des bêtes que des humains. Vivant dans la nature, les sauvages sont sans culture, sans écriture, sans histoire, sans division technique du travail, sans monnaie, etc. C’est pourquoi tous les sauvages se ressemblent dans la littérature classique, même s’ils viennent de sociétés aussi différentes que celles qui se sont développées en Amérique du Nord, dans le Pacifique ou dans les Caraïbes. Méconnaissant ce qu’ils sont en eux-mêmes, le mythe du « bon sauvage » sert en réalité moins à connaitre les cultures étrangères qu’à critiquer notre propre culture en lui présentant un miroir peu flatteur.
Paradoxalement, les « sauvages » semblent en effet vivre au Paradis malgré (ou peut-être grâce à ?) l’absence primitive de toutes les institutions qui définissent notre civilisation. Les Européens projettent sur eux l’image d’une enfance rêvée de l’humanité, innocente et libre.

2. La cristallisation du mythe

Les Dialogues de Monsieur le baron de Lahontan et d’un sauvage dans l’Amérique (1703) connaissent un grand succès au XVIIIe siècle. Écrits par le Baron de Lahontan qui a vécu en Amérique du Nord, ces dialogues mettent en scène les entretiens fictifs de l’auteur et d’un Huron. Le livre présente surtout l’intérêt de fixer les trois caractéristiques principales traditionnelles du mythe du « bon sauvage » : égalité, frugalité, naturalité. La société huronne est égalitaire. Il ne peut y avoir en son sein ni riches, ni pauvres, puisqu’elle ignore la propriété privée, la distinction du tien et du mien. Cette égalité économique s’accompagne de l’égalité politique : chaque Huron est « le premier et le dernier de sa nation », il n’a pas de chef et il n’est le chef de personne. La société du « bon sauvage » se caractérise ensuite par la frugalité. Les Hurons se contentent du minimum et une fois les nécessités de la vie satisfaites, ils cessent de travailler pour se consacrer aux loisirs et au repos. Enfin, les Hurons suivent les règles de la nature. Cela signifie concrètement que leurs relations amoureuses et leur sexualité ne sont pas réprimées comme chez les Européens par des interdits artificiels et arbitraires qui incitent davantage à l’hypocrisie qu’à la fidélité. Les Hurons, femmes incluses, vivraient leurs amours de façon égale et libre, sans se torturer le corps et l’esprit, sans mensonges et avec moins de malheurs.

3. L'envers du mythe

Sans foi, sans loi, sans roi, le « bon sauvage » mythifié apparait, chez Lahontan, comme un outil critique efficace pour inciter à réformer, voire à révolutionner, l’Ancien Régime. Pour les religieux et les souverains, ce mythe justifie la colonisation. Sans foi ? Des missionnaires viendront sauver leurs âmes païennes. Sans loi et sans roi ? C’est donc qu’ils vivent dans une violence anarchique qui doit être pacifiée par l’autorité d’un Souverain. L’ambiguïté du mythe est là. Si les sauvages ne sont pas ce que nous sommes, il faut soit s’inspirer d’eux, soit leur apporter les bienfaits de la civilisation. La littérature et la philosophie pencheront souvent du premier côté. La colonisation cèdera résolument au second, mais ses « bienfaits » consisteront pour l’essentiel à exploiter et massacrer. Haïti compte un million d’autochtones quand Colomb y débarque. Trente ans plus tard, en 1522, ils ne sont plus que 28 000.

Au XXe siècle, des ethnologues ont voulu rendre justice à ces peuples alors en train de disparaitre définitivement. Ils donnent à voir un visage des « sauvages » plus humain que la caricature mythique et littéraire passée. Mais les mythes ne disparaissent pas si facilement. C’est ainsi que Nicolas Sarkozy, alors président de la République française, a pu dire en 2007 que « le drame de l’Afrique » tenait au fait que « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire », qu’il est resté prisonnier des cycles naturels répétitifs qui interdisent tout progrès. Hegel, un philosophe allemand, disait à peu près la même chose en 1821, dans un cours consacré à la raison dans l’histoire. Et tous deux recyclent de vieux préjugés nés à la toute fin du Moyen Âge.

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