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La muse des poètes grecs, classiques et romantiques

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Parler de la muse d’un artiste est une expression courante, presque usée, pour désigner une femme, souvent bien réelle, dont la présence serait source d’inspiration. Cependant, à l’origine, la muse est un personnage de la mythologie, une divinité invisible aux mortels. Elle pose la question plus vaste du mystère de la création artistique : est-elle extérieure à l’artiste ou en lui ? Est-elle divine ou humaine ? Quelle est, finalement, la nature de la force créatrice, et comment les artistes la conçoivent-ils ?

Un balayage historique de la vision de la muse permettra de donner des pistes de réflexion sur la nature de l’inspiration.

1. Muse et inspiration à l’époque antique

Dans la mythologie grecque, les Muses sont les filles de Mnémosyne, la Mémoire, car les mortels qu’elles inspirent atteignent l’immortalité en restant dans la mémoire des hommes. Le poète Hésiode donne leurs noms et leurs spécialités : Calliope pour la poésie épique, Clio pour l’histoire, Érato pour la poésie lyrique, Euterpe pour la musique, Melpomène pour la tragédie, Thalie pour la comédie, Polymnie pour la rhétorique, Terpsichore pour la danse et Uranie pour l’astronomie.

On retrouve l’idée d’immortalité par la parole dans l’Odyssée, lorsqu’Ulysse choisit de quitter l’ile de la nymphe Calypso et refuse l’immortalité physique auprès d’elle. « Calypso » vient du grec kaluptô (cacher, dissimuler) : elle est celle qui cache Ulysse au monde. Lorsqu’il réapparait, il peut conter les aventures qu’il a vécues et les épreuves qu’il a subies, au cours du banquet chez les Phéaciens comme lors de sa nuit de retrouvailles avec Pénélope.

La muse de l’épopée est traditionnellement Calliope, mais la nommer est inutile au poète : lorsqu’il l’invoque au début de ses œuvres, Homère l’appelle simplement Muse ou déesse. Il se définit aussi comme le vecteur de cette parole, non le créateur, l’oreille et non la bouche. Il commence ainsi ses épopées : « Chante, déesse, la colère d’Achille, fils de Pélée » (Iliade, I, 1) et « Dis-moi, Muse, l’homme aux mille ruses qui erra si longtemps » (Odyssée, I, 1). Le poète se présente donc comme possédé par la divinité qui s’exprime à travers lui, vision que Socrate partage dans Ion de Platon. Selon Socrate, les poètes chantent et composent sous l’impulsion d’une possession, d’un délire sacré qui leur ôte la raison. Il faut que le poète perde son intelligence propre pour être inspiré et que, comme un papillon, il aille butiner dans les jardins des Muses pour en ramener du miel.

L’étymologie permet d’éclairer l’importance de la parole et le rôle du poète :

  • l’épopée, le genre le plus noble, vient de épos (le mot, la parole) ;
  • Homère est un « aède », du verbe aidô (chanter) : les aèdes s’accompagnaient de leur lyre pour dire les dialogues et psalmodier les passages narratifs ;
  • le terme de poète est issu de poïeô (fabriquer, créer).

Quant au terme « poésie lyrique », créé au XVIIIe siècle pour désigner une poésie émouvante qui exprime les sentiments intimes du poète, il s’inspire de l’histoire du poète par excellence, Orphée. Qu’il retransmette les paroles d’une divinité ou qu’il crée, le poète grec atteint presque un statut divin. En effet, grâce à son art, Orphée peut aller à l’encontre des lois naturelles : son chant de désespoir pour retrouver sa défunte épouse Eurydice arrête temporairement des châtiments éternels aux Enfers, émeut les inflexibles souverains de ce lieu et, plus tard, fait accourir à lui les arbres qui veulent lui donner de l’ombre en l’écoutant.

2. Muse et inspiration de la Renaissance au XIXe siècle.

Au Moyen Âge, la culture antique cède le pas à la culture chrétienne. Ce n’est qu’au XVIe siècle qu’elle revient à l’honneur, à partir de l’Italie, grâce au courant culturel et artistique de la Renaissance. On redécouvre alors la littérature, la philosophie et les sciences de l’Antiquité.

En France, un groupe de sept poètes (dont Joachim Du Bellay et Pierre de Ronsard) se constitue et se donne le nom de « Pléiade », en référence aux sept étoiles de cette constellation. Ils se fixent pour objectif de revivifier la langue française grâce à des emprunts au latin ou des néologismes, et d’imiter (pour mieux les dépasser !) les genres et les auteurs de l'Antiquité.

Ronsard divise son recueil le plus connu, Les Amours (1552), en différents livres : Les Amours de Cassandre, Nouvelle continuation des Amours, Sur la mort de Marie, Sonnets pour Hélène. Ils portent respectivement sur Cassandre Salviati, la fille de banquier italien, une certaine Marie Dupin, vivant modestement à Bourgueil, Marie de Clèves, défunte favorite d’Henri III et Hélène de Surgères, suivante de Catherine de Médicis. L’inspiration poétique de Ronsard lui vient, à l’évidence, du sentiment amoureux que lui inspirent ces femmes. Mais lorsqu’il parle de poésie, il poursuit la métaphore amoureuse : « La poésie est un feu consumant / Par grand ardeur l’esprit de son amant » (Poésies diverses, 1587).

La poésie classique du XVIIe siècle est peu abondante, si l’on excepte Jean de La Fontaine, dont les plus connues des œuvres sont tournées vers un but moral. Il faut attendre André Chénier, au XVIIIe siècle, pour voir vraiment réapparaitre l’idée de muse. Ses poèmes, qui imitent les modèles antiques, lui permettent d’exprimer des sentiments amoureux. Dans Invocation à la Poésie, il écrit : « Nymphe tendre et vermeille, ô jeune Poésie ! Quel bois est aujourd’hui ta retraite choisie ? Quelles fleurs, près d’une onde où s’égarent tes pas, Se courbent mollement sous tes pieds délicats ? »
La poésie classique, comme on le voit, réduit souvent la figure de la muse à la femme aimée, et l’utilise comme moyen de la valoriser, sans interroger de manière plus profonde la source de l’inspiration poétique.

C’est au XIXe siècle que des réflexions nouvelles sur l’inspiration poétique voient le jour. Le Romantisme fait naitre des œuvres souvent marquées par la mélancolie due à la fuite du temps, la mort, le sentiment de perte, le rapport à la nature et la solitude de l’artiste. Bien que l’influence de la femme aimée reste perceptible dans les œuvres, la source de l’inspiration des poètes romantiques semble à la fois plus intérieure au poète et plus grande que lui. Victor Hugo qualifie le poète de « rêveur sacré » et affirme que « Dieu parle à voix basse à son âme / Comme aux forêts et comme aux flots. » (« Fonction du poète », Les Rayons et les ombres, 1840). Dans « Ce que dit la bouche d’ombre » (Les Contemplations, 1856), Hugo retranscrit les paroles d’un spectre qui s’adresse à lui directement, un être « sombre et tranquille » qui révèle dans un très long poème, les secrets de l’univers. Le poète occupe ainsi une fonction quasi prophétique, puisqu’il a la charge de retransmettre ce que lui dicte Dieu ou la nature.

Pour Baudelaire, le poète est un « Prince des nuées […] exilé sur le sol » (L’albatros). Dans ce poème célèbre, il se met en scène, planant au-dessus des hommes, en contact avec le monde de l’Idéal qu’il décrit longuement dans son recueil Les Fleurs du mal (1857).

Pour Rimbaud, c’est le contact avec la nature, lors de ses fugues, qui le rend « heureux comme avec une femme » (Sensation) et qui lui donne de l’inspiration (« Mes étoiles au ciel avaient un doux frou frou / Et je les écoutais, assis au bord des routes », Ma Bohème). Dans sa célèbre lettre dite « du voyant » où il exprime sa conception de l’inspiration poétique, il déclare tout d’abord que « Je est un autre » évoquant une sorte de dépossession poétique de lui-même lorsqu’il compose :

Car Je est un autre. Si le cuivre s’éveille clairon, il n’y a rien de sa faute. Cela m’est évident : j’assiste à l’éclosion de ma pensée : je la regarde, je l’écoute : je lance un coup d’archet : la symphonie fait son remuement dans les profondeurs, ou vient d’un bond sur la scène.
Arthur Rimbaud, Lettre à Paul Demeny, 15 mai 1871.

Le poète, selon Rimbaud, doit se faire voyant et pour cela, il doit opérer « un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens », renvoyant au délire socratique de l’inspiration, où le poète doit abandonner son intelligence.

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