La démocratie peut-elle échapper à la démagogie ? - Maxicours

La démocratie peut-elle échapper à la démagogie ?

Objectif

Savoir si la démocratie peut échapper à la démagogie

Points clés
  • La démocratie, représentant le « contrat social », serait le type de gouvernement idéal.
  • Cependant, la démocratie peut parfois instiller les dérives démagogiques.
  • Pour que la démocratie fonctionne, il faut qu'elle soit directe et que le peuple reçoive une éducation politique.
1. La démocratie comme idéal
a. Les formes de gouvernement

À la question de savoir quel est le meilleur régime pour gouverner les hommes, et qui doit commander, il faut donc tenter de répondre :

  • dans la monarchie, un seul (mono), gouverne l'ensemble ;
  • dans l'aristocratie, une élite, constituée des meilleurs (aristos), gouverne l'ensemble ;
  • dans la démocratie, le pouvoir appartient au peuple (dèmos).


À cela s'ajoutent deux principes de gouvernement :

  • un gouvernement en vue de l'intérêt ou bien commun : la république ;
  • un gouvernement en en vue d'un intérêt particulier : le despotisme.


Une monarchie peut être soit républicaine, soit despotique. La même chose est vraie pour un système aristocratique. Mais il semble, en théorie, que seule une démocratie puisse assurer un gouvernement républicain, car comment imaginer que l'ensemble des hommes ne gouverne pas dans l'intérêt de chacun et de tous ?
La question se pose justement de savoir comment l'intérêt de chacun peut coïncider avec l'intérêt de tous, et comment les volontés particulières peuvent s'articuler autour de la volonté générale. Rousseau, dans le Contrat social (1762), a en effet pris soin de distinguer la « volonté de tous » de la « volonté générale ». La volonté générale n'est pas la somme de toutes les volontés particulières mais elle représente la « volonté de tous ».

b. La théorie de la démocratie selon Rousseau

La théorie du « contrat social » repose sur l'idée que le meilleur gouvernement, qui assure liberté et égalité à tous et qui œuvre dans l'intérêt général, s'incarne dans la république, en tant qu'elle inclue les principes d'un régime démocratique :

« J'appelle république tout État régi par des lois, car alors seulement l'intérêt public gouverne [...] tout gouvernement légitime est républicain. [...] Le Peuple soumis aux lois en doit être l'auteur. »
(Du contrat social, Livre II, chap. VI)

La démocratie, que Rousseau nomme république, est seule capable d'échapper à la tyrannie, à l'usurpation, à la démagogie et à la manipulation, car c'est le peuple devenu citoyen qui est tout à la fois souverain (il détient le pouvoir) et législateur (il fait lui-même les lois auxquelles il se soumet). La démocratie semble le meilleur régime en théorie, mais ne peut-elle dans la pratique dégénérer en démagogie ? Rousseau lui-même s'interroge :

« Comment une multitude aveugle qui souvent ne sait ce qu'elle veut, parce qu'elle sait rarement ce qui lui est bon, exécuterait-elle d'elle-même une entreprise aussi grande, aussi difficile qu'un système de législation ? »
(Livre II, chap. VI)
2. La démagogie comme dérive naturelle de la démocratie
a. Confusion entre plaisir et bien commun

Platon se méfie de la démocratie où « tout déborde de liberté », et considère la monarchie comme le meilleur régime, parmi les régimes qu'il répertorie. S'il affirme que seul le philosophe peut gouverner la Cité, et non le peuple, s'il écrit que la démocratie est le règne de la passion débridée et du bon plaisir, le règne dans lequel tout le monde voulant être le maître, personne n'accepte d'obéir, c'est parce que la démocratie cache en elle un mal possible : la démagogie, où règne la flatterie des instincts égoïstes et des passions basses (La République, Livre VIII).
Selon lui, la démocratie, au sein de laquelle prévalent la liberté et l'égalité, se transformera immanquablement en anarchie :

« Le père s'accoutume à traiter son fils comme son égal et à redouter ses enfants [...], le fils n'a ni respect ni crainte pour ses parents, parce qu'il veut être libre [...], le métèque devient l'égal du citoyen, le citoyen du métèque et l'étranger pareillement. »
(562 a)

Confondant le bien commun avec le plaisir immédiat et la satisfaction des désirs superflus, un peuple non éduqué politiquement, un peuple qui n'est pas philosophe, qui n'est pas tourné vers la sagesse, et vers une vision commune du bien, peut se perdre et se vendre au plus flatteur, au démagogue, à celui qui lui promettant toujours plus, lui vole ainsi sa liberté et le gouverne comme un animal.

b. Confusion entre égalité et uniformité

L'autre cause de la dérive possible de la démocratie en démagogie tient au fait qu'un peuple qui se gouverne lui-même, adopte un gouvernement démocratique pour assurer une égalité de tous les individus.

Mais, précisément, au nom de l'égalité mal comprise, la multitude exige une identité stricte entre les hommes et tombe ainsi dans un « despotisme mou ». C'est ce que souligne Tocqueville :

« Je veux imaginer sous quels traits nouveaux le despotisme pourrait se produire dans le monde : je vois une foule innombrable d'hommes semblables et égaux qui tournent sans repos sur eux-mêmes pour se procurer de petits et vulgaires plaisirs, dont ils emplissent leur âme. Chacun d'eux, retiré à l'écart, est comme étranger à la destinée de tous les autres : ses enfants et ses amis particuliers forment pour lui toute l'espèce humaine. »
(De la démocratie en Amérique, Quatrième partie, chapitre VI, 1835-1840)

Réduit à son plaisir immédiat, à une sorte d'enfance ou vie animale, le peuple se laisse ainsi flatter dans un bonheur vide et sans but, et laisse encore une fois le vrai et seul pouvoir de gouverner à ceux qui en le flattant ainsi le manipulent d'autant mieux :

« Au-dessus [des individus] s'élève un pouvoir immense et tutélaire, qui se charge seul d'assurer leur jouissance et de veiller sur leur sort [...], il aime que les citoyens se réjouissent, pourvu qu'ils ne songent qu'à se réjouir. Il travaille volontiers à leur bonheur ; mais il veut en être l'unique agent et le seul arbitre [...] »
3. La démocratie : une construction toujours fragile
a. Le problème de la représentation

Selon Rousseau, dans le Contrat social, la démocratie doit être directe, et non indirecte. Dans une démocratie indirecte, ce sont des représentants élus par le peuple qui gouvernent en son nom. Or, pour se faire élire d'une multitude, n'est-il pas plus aisé, comme le conseillait déjà Machiavel dans Le Prince, de flatter les passions du peuple pour mieux s'en servir et le conduire vers des fins qui ne sont pas les siennes ?

Quel peuple peut être digne d'une démocratie ? Celui qui vote pour le démagogue lui promettant la facilité, le plaisir, l'absence de contrainte et d'impôt, ou celui qui comprend que les contraintes, les limites aux plaisirs et à la satisfaction de chacun sont nécessaires pour le bien de tous ? Apparait ainsi le problème de la conquête de pouvoir par certains hommes plus rusés que les autres.

b. Le problème de l'éducation politique

Il semble difficile pour une démocratie d'échapper à la démagogie, si l'éducation politique du peuple n'est pas faite. Le bonheur et l'égale liberté de tous exige des restrictions et sacrifices individuels. Ainsi que l'énonçait Rousseau, « il n'y a pas de liberté sans lois ».
La démocratie vise un avenir commun meilleur, le démagogue cherche seulement pour lui-même et au présent à conserver un pouvoir, en promettant un avenir illusoire. Il sacrifie ainsi les minorités et les plus fragiles sur l'autel de la flatterie du plus grand nombre.

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