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L'Odyssée : synthèse 1, L'Epopée : de l'oral à l'écrit...

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Objectifs :
- Synthétiser les lectures de l’œuvre, en avoir une vision d’ensemble.
- Amener les élèves à saisir les enjeux de l’oralité et la dimension écrite du texte narratif.
- Se préparer à la dissertation sur l’œuvre au programme.
Les citations font référence à l’édition « La Découverte », traduction, notes et postface de Philippe Jaccottet.

Beaucoup d’auteurs et critiques ont remis en question l’origine de L’Iliade et L’Odyssée jusqu’à douter même de l’existence d’Homère considéré aussi comme un aède illettré. Les deux épopées les plus connues, les plus anciens textes littéraires grecs relèvent en effet d’une longue tradition orale, transmise par les aèdes, au moyen d’une mémoire orale commune.

Problématique : Alors, dans quelle mesure l’oralité est-elle constitutive du genre épique ? Comment expliquer la référence textuelle incontournable de ces épopées, dans la mesure où leur transcription manuscrite devient une forme fixée pour tous ?
1. L'oralité
La poésie porte les marques de la tradition orale : elle est destinée à être lue, interprétée, jouée. De son origine orale, découlent des caractéristiques fondamentales du texte épique colporté par les aèdes, avant leur fixation dans la tradition manuscrite.
a. L'omniprésence du narrateur
Le récitant : L’œuvre est construite sous forme de monologues, de récitatifs ou de dialogues qui sont déclamés par un seul récitant, interprétant à tour de rôle les différents intervenants du récit.
L’aède s’adresse aux Muses pour obtenir inspiration et pour capter l’attention des auditeurs sur le thème, le personnage, la quête dont il va être question. Les épopées commencent par une invocation des Muses, invocation conventionnelle et modèle introductif traditionnel de la poésie orale.
Exemple : Ainsi, dès le chant I, l’aède apostrophe la Muse : « Ô Muse, conte-moi l’aventure de l’Inventif : celui qui pilla Troie, qui pendant des années erra, voyant beaucoup de villes, découvrant beaucoup d’usages, souffrant beaucoup d’angoisses dans son âme sur la mer pour défendre sa vie et le retour de ses marins. » (chant I, vers 1-10, page 12) Le prologue présente Ulysse, annonce ses périlleux voyages, puis l’origine de son périple jusqu’à la mort de ses compagnons.

L’aède, continuateur privilégié de la Muse, lutte contre le danger de l’oubli. Il permet ainsi aux héros d’échapper à la mort en leur insufflant une vie glorieuse, en participant au culte du héros mythique. Au cœur même de l’épopée, les figures de l’aède incarnent la permanence du souvenir, s’opposant aux forces de l’oubli que représentent les Sirènes ou les fruits du Lotos, par exemple.
Exemple : Démodocos pratique son art poétique au cours du banquet. Il est dit de lui : « Un héraut s’avança, conduisant le fidèle aède à qui la Muse qui l’aimait a donné bien et mal, lui ayant pris ses yeux, mais donné la douceur du chant. » (Chant VIII, v.62-64, p.125) L’aède chante « la gloire des hommes (…) un récit dont le renom touchait alors le ciel, la querelle d’Ulysse et d’Achille » (v.73-75, p.126) puis l’épisode du cheval de Troie, chant qui émeut aux larmes Ulysse, chant qui amène à la révélation de l’identité du héros.
Le personnage de l’aède est omniprésent à l’intérieur même du conte, garantissant la tradition orale vivante de laquelle est issue L’Odyssée.
b. Les scènes typiques
La dimension orale de l’épopée impose une structure en scènes typiques autour desquelles le poète improvise au gré de sa performance orale. La composition du poème en séquences ou leitmotive (telles le sacrifice, le banquet et la réception des hôtes, le départ en mer, la tempête) permet de dissocier différentes séquences narratives indépendantes qui sont autant de représentations modulables pour l’aède.
La division en 24 chants correspond à des temps de représentations possibles pour un aède, des étapes narratives constituant des entités indépendantes.

Exemple : La scène de la tempête en mer est un véritable leitmotif, revenant à plusieurs reprises dans l’épopée. Après une première tempête au chant V reprise au chant VII par le personnage (avec un changement de point de vue), un autre récit intervient au chant IX, puis un nouveau en quittant le pays des Cicones, ou encore au chant X, quand les compagnons ouvrent l'outre d'Eole, et enfin, au chant XII après le sacrilège des bœufs d’Hélios. L’épreuve s’accompagne à chaque fois d’une initiation du héros mis en danger, une confrontation face à l’incommensurable, une renaissance…
Prenons l’exemple du chant V : il constitue une séquence narrative complète : le départ en mer est sollicité par Athéna ; l’aventure est déclenchée par une divinité adverse ; le retour au calme est permis par l’intervention de divinités favorables à Ulysse. L’épreuve est close.
Chacun constitue une entité narrative close, de la situation initiale à la situation finale.
c. La formule
L’hexamètre dactylique permet la mise en valeur de formules, d’adjectifs homériques dépendant des caractéristiques rythmiques des vers. La répétition permet la caractérisation des personnages fondamentaux du récit, la reprise des scènes récurrentes, mais aussi et surtout elle fonctionne comme un repère mnémotechnique pour l’aède. Ainsi, certaines divinités sont caractérisées par des expressions typiques, facilement mémorisables et reconnaissables.
Exemple : Pour, Zeus la formule insiste sur la toute puissance du dieu qui maîtrise l’univers : il est celui « qui règne sur le monde » (chant IX, vers 552), « celui qui tonne dans le ciel », (chant V, vers 4), « celui qui sait rallier les nuages », (chant V, vers 21), « le rassembleur des nues », (chant IX, vers 67). Ces formules nous donnent l’image d’un dieu céleste tout puissant. Les éclairs, le tonnerre et les nuages lui obéissent.
d. Les archaïsmes
L'archaïsme représente ce qui n’est plus d’usage, relevant d’un passé révolu.
La transmission par la mémoire d’un contexte plus ancien montre que l’oralité permet de faire resurgir une réalité passée, relativement au monde mycénien, avant même l’invention de l’écriture. Sont évoqués par les critiques des exemples d’anachronisme comme certaines méthodes de combat, les armes utilisées, qui attestent d’une longue tradition orale, au-delà des siècles et frontières…
Exemple : Citation de Jacqueline de Romilly : « La langue homérique est un mélange de formes d'époques diverses, qui n'ont jamais été employées ensemble et dont la combinaison relève d'une liberté purement littéraire. »
2. Le texte, la traduction manuscrite
a. La langue exploite les ressources du langage oral
Les comparaisons
L’aspect concret des comparaisons sollicite l’attention et l’imagination de l’auditoire, lui permettant d’associer deux réalités : ce qu’il entend et une réalité qu’il connaît. Les nombreuses comparaisons confèrent un réalisme certain à la scène contée. Dans les chants V et VI, le narrateur omniscient fait appel à des comparaisons pour évoquer les aventures d’Ulysse après qu’il ait quitté Calypso et lorsqu’il affronte la tempête. Dans les chants suivants, Ulysse devient le narrateur et son récit n’utilise pas le recours à l’analogie.
Exemple : Pendant la tempête qu’Ulysse essuie, il est comparé à un végétal insignifiant comme « les chardon, un tas de paille sèche, le chaume ». La densité des comparaisons traduit l’impuissance d’Ulysse et la puissance démesurée du vent. Ulysse est pris au piège entre des forces surnaturelles, déchaînées contre lui. La comparaison, la puissance de l’image traduisent l’impuissance du héros réduit à l’état d’objet subissant le caprice des dieux.

L’oralité au service de l’émotion, l’émotion du texte écrit
L’effusion de sentiments est palpable à plusieurs reprises dans le récit. Si l’oralité du récit permet le mime d’une émotion puissante et une pantomime expressive, le manuscrit ne trahit nullement l’intensité de certaines scènes. Les passages dans lesquels Ulysse exprime son émotion sont très visuels et sollicitent l’imagination du lecteur : de la tristesse profonde à la joie intense, les mots se déclinent dans des champs lexicaux largement développés, des images évocatrices, des rythmes et musicalités étourdissantes.
Exemple : Dans le chant IX, l’aède a recours à une comparaison avec une situation pathétique extrême, celle de la veuve pleurant son époux mort pour défendre les siens. Le vocabulaire exploite le champ lexical de la mort violente, développe l’image de la veuve hurlant sa douleur sur le corps défunt (chant IX, vers 526-530, page 138). L’abondance des larmes (suggérée par les nombreux pluriels « des pleurs coulaient de ses paupières sur ses joues », « aux cils, de pitoyables larmes », « ses pleurs »), la comparaison avec la souffrance de la veuve, les tournures hyperboliques (« la plus pitoyable angoisse ») accentuent le pathétique devenant impudique, voire insupportable.

De l’oral à l’écrit, du visuel au textuel, le pathétique demeure servi par les comparaisons homériques, comparaisons efficaces et expressives…
b. Une poétique propre : l'essence des poèmes homériques
Donner à voir
Les personnages, notamment les déesses, sont qualifiées par des attributs physiques. Le texte écrit et figé par les alexandrins donne à voir, stimule l’imagination du lecteur.
Exemples : Pallas Athéna est « la déesse aux yeux brillants » (chant V, vers 437 ; chant VI…), « aux yeux étincelants », (chant VII, vers 19 et 41...) Le regard traduit ainsi par l’image l’astuce, la ruse et l’intelligence dont fait preuve la déesse. Elle est aussi « la déesse bouclée, la redoutable », (chant VII, 41), ou nombre de personnages dont elle revêt l’apparence.

La scène de reconnaissance entre Ulysse et Athéna au chant XIII est d’ailleurs basée sur l’apparence, sur des éléments descriptifs, sur un jeu de travestissements successifs : Athéna s’approche d’Ulysse « sous les traits d’un tout jeune pâtre ». L’apparence du berger a son importance : le texte donne à voir la jeunesse extrême et la simplicité du pâtre, sa noblesse naturelle, son allure vestimentaire ainsi que les attributs divins apparents… Lorsqu’elle choisit de révéler son identité, c’est d’abord son apparence et son immense beauté qu’elle dévoile à Ulysse, avant même de parler. La scène se base essentiellement sur un jeu d’apparences, de quiproquos, de mensonges et de reconnaissances. Le texte écrit traduit parfaitement la théâtralité de la scène, héritage évident d’une tradition orale et d’un jeu de l’aède-acteur, incarnant les personnages à tour de rôle.

Donner à savoir
L’oralité du récit permet de transmettre des leçons, des idéaux de vie, en insérant des phrases à l’allure de proverbes et sentences. Les formules interviennent au présent de vérité générale pour frapper l’auditeur ou le lecteur. Se dessine alors des valeurs illustrant le bonheur du foyer familial avant même l’amour de la patrie. De l’oral à l’écrit, les valeurs se transmettent et s’ancrent dans une fixité qui traverse les siècles.
Exemple : l’hospitalité est un devoir sacré respecté par les phéaciens, refusé par Polyphème. Le rituel de la réception de l’invité, le don de présents, la réponse à ses interrogations est un motif qui traverse toute l’épopée. Lorsqu’Ulysse s’adresse à Polyphème en ces termes : « nous voici donc à tes genoux, dans l’espoir que tu nous accueilles et que, de plus, tu nous fasses un don, selon la coutume des hôtes », c’est pour mentionner un devoir auquel seul un barbare se dérogerait.
Se lit en filigrane, la volonté de marquer l’éthique collective d’une population, ses rituels et obligations.
Conclusion
C’est en oscillant entre la dimension orale et la traduction écrite de l’œuvre que s’est posée la « question homérique », c’est-à-dire la question de l’origine de l’épopée, à savoir si elle résulte de la tradition orale s’appuyant sur des contes antérieurs à Homère ou si elles relèvent de la traduction manuscrite de l’aède. Toujours est-il que la dimension orale du texte figé par les scribes fait incontestablement revivre la tradition orale de son origine.

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