Liberté privée et liberté politique chez Benjamin Constant

Pour Constant, les libertés privées doivent être protégées par l’État. Elles priment sur l’intérêt du collectif, contrairement au système mis en place chez les Anciens.

Ainsi, être un homme libre signifie détenir les libertés suivantes :

« C’est pour chacun le droit de n’être soumis qu’aux lois, de ne pouvoir être ni arrêté, ni détenu, ni mis à mort, ni maltraité d’aucune manière, par l’effet de la volonté arbitraire d’un ou de plusieurs individus. C’est pour chacun le droit de dire son opinion, de choisir son industrie, et de l’exercer ; de disposer de sa propriété, d’en abuser même ; d’aller, de venir, sans obtenir la permission, et sans rendre compte de ses motifs ou de ses démarches. »
Benjamin Constant, De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes, 1819

Cependant, ces libertés n’ont de sens que dans le cadre d’un système politique. Il n’évacue donc pas la notion de liberté politique présente chez les Anciens, mais ce système politique ne peut pas être la démocratie directe.

Constant défend donc la mise en place d’un système politique représentatif, qui aurait comme mission principale la défense des libertés privées.

En effet, les États modernes comptent une population bien plus importante que les sociétés antiques. Dès lors, une participation directe de tous les citoyens serait impossible en pratique.

De plus, les sociétés modernes ne reposent ni sur l’esclavage, ni sur la guerre. Les individus n’ont pas le temps nécessaire pour se préoccuper en continu de politique.

Cependant, Constant insiste sur le fait que les citoyens d’une telle société doivent pouvoir contrôler leurs représentants afin de se prémunir contre l’arbitraire.

Dans son discours De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes, Constant critique les penseurs de la Révolution française. Pour lui, ils ont fait l’erreur de vouloir imposer la conception de la liberté politique des Anciens dans une société moderne.

Constant critique ainsi les idées du philosophe des Lumières Jean-Jacques Rousseau (1712-1778).

En effet, Rousseau attribue à la « volonté générale » une autorité illimitée. Pour Constant, cela implique que le régime politique puisse ne pas respecter les droits individuels. Rousseau ne comprend pas que substituer l’oppression d’un individu ou d’un groupe par celle de tous revient exactement au même, c’est-à-dire à la perte totale des libertés individuelles.

De plus, il n’y a pas, chez Rousseau, un espace de vie intime sur lequel le pouvoir législatif n’a pas accès. Le groupe contrôle l’ensemble.

Ainsi, les idées de Rousseau dans Du Contrat social peuvent, selon Constant, mener à la tyrannie.