Les Perses, Eschyle
Quelle est la composition de cette tragédie ?
« Ci-gît Eschyle, fils d'Euphorion, d'Athènes,
Enterré dans le sol fertile de Géla,
Et bien connu pour son courage à la bataille :
Le bois de Marathon et les Mèdes l'attestent. »
Les Perses raconte la défaite navale des Perses et de leur roi Xerxès lors de la bataille de Salamine en -480.
Il est étonnant de noter que la pièce est jouée seulement 8 ans après les événements et qu'Eschyle, qui la présente au concours tragique des Grandes Dionysies, remporte un triomphe. Son chorège - riche athénien chargé d'assumer les coûts des représentations - n'est autre que Périclès alors âgé de 20 ans.
Liée à la vie de la cité par son organisation - les plus riches citoyens financent les représentations et une indemnité est versée aux plus pauvres pour qu'ils puissent assister à la pièce - la tragédie grecque, avec Les Perses qui célèbre l'hégémonie de la cité sur le monde grec, se constitue tout de suite en genre éminemment politique puisque son avènement coïncide avec celui de la démocratie athénienne.
Le chœur des Perses est composé de 12 vieillards. Leur chef, le coryphée, est l'interlocuteur privilégié des personnages : la reine Atossa, mère de Xerxès et veuve de Darius, l'ombre de Darius, roi des Perses, Xerxès, roi vaincu, et le messager qui rapporte les évènements de la défaite. Eschyle introduit le deuxième acteur, le deutéragoniste ; il utilise déjà un dialogue sous formes de questions-réponses, embryon de la stichomythie (un vers répond à un vers) à laquelle Sophocle donne véritablement naissance.
Chaque entrée des personnages détermine la structure de la pièce. Quatre moments concentrent l'action : l'entrée en scène de la Reine, du messager qui raconte la défaite et la retraite de l'armée, l'apparition de Darius, et le retour de Xerxès, roi vaincu et personnage tragique.
Les chants du chœur et ses lamentations font écho aux chants funèbres des poètes lyriques comme Pindare.
Notons toutefois qu'à la différence de l'épopée, c'est la défaite et non la gloire du héros qui est le corps du texte tragique : c'est la fragilité de la condition humaine qui est privilégiée et non la valeur virile et guerrière des soldats.
En outre, Eschyle y adopte le point de vue de l'ennemi vaincu, c'est-à-dire le point de vue de l'autre, et ainsi la guerre est vécue dans son horreur barbare et destructrice. Les ressorts de la catharsis (purgation des passions humaines) - terreur et compassion - opèrent pleinement sans que le spectateur ne soit directement impliqué : il ne s'identifie pas en tant que grec ou perse mais simplement comme Homme.
La pensée d'Eschyle dépasse ainsi le particulier de l'Histoire pour atteindre le général.
Interrogation sur la fragilité de la condition humaine, où l'autre devient le même, dans sa nécessaire finitude, la tragédie nous rappelle la vanité de notre condition.

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