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Les échanges chez Jean-Jacques Rousseau

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Au 18e siècle, Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) élabore une philosophie politique mettant au premier plan une critique de la société et proposant une nouvelle manière d’envisager les rapports humains. La question des échanges est abordée : d’une part du point de vue social, d’autre part du point de vue politique.
Dans le Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes (1755), Rousseau, observant les rapports humains qui caractérisent la société française du 18e siècle, s’interroge sur l’origine de l’inégalité sociale : est-elle naturelle ? Est-elle instituée ? Dans Le Contrat Social, Rousseau, critiquant les institutions de l’Ancien Régime, expose une théorie politique centrée sur la souveraineté de peuple et l’égalité des droits. Cet ouvrage aura une forte influence sur la pensée des révolutionnaires français. La même année est publié L’Émile : cet ouvrage est consacré à l’éducation. Rousseau considère la formation de l’être humain dès les premières années de la vie : l’éducateur doit préserver les aptitudes naturelles de l’enfant et avoir souci de former un citoyen libre et vertueux. Il est intéressant de noter à cet égard que Rousseau, orphelin de mère, a été abandonné à l’âge de 10 ans par son père, et que lui-même a abandonné à son tour ses cinq enfants aux « Enfants trouvés », faute de moyens financiers.

1. De l'état de nature à l'état social
a. L'homme à « l'état de nature » : solitaire et autosuffisant
Rousseau fait l’hypothèse d’un « état de nature » antérieur à la formation des sociétés : les hommes vivent isolés les uns des autres et assurent leurs besoins vitaux sans le secours d’autrui. La nature extérieure (vastes forêts) est bienveillante : ses productions sont abondantes, chaque homme se nourrit de produits végétaux facilement accessibles. Les êtres humains sont pacifiques et doux : ils ne se disputent pas entre eux la nourriture, ils n’attaquent pas les autres êtres vivants pour survivre (ils ne sont pas carnivores). Ils se rencontrent de manière épisodique et raréfiée (notamment pour la reproduction et le soin des petits), sans nouer aucun rapport durable : ils ne recherchent pas la compagnie de leurs semblables, ils n’ont aucune sociabilité. Ils sont indépendants les uns des autres. Ainsi Rousseau semble s’opposer à Aristote : l’homme isolé parvient à survivre par lui-même et ne cherche pas à nouer de liens avec ses semblables.
b. L'homme à « l'état de nature » n'a pas besoin d'effectuer d'échanges
Les échanges réfléchis et conscients sont inexistants : ni la raison, ni le langage, ni les sentiments, ne sont développés. L’homme est un animal solitaire se comportant instinctivement. Il existe en lui deux tendances spontanées (c’est-à-dire deux mouvements irréfléchis et involontaires) : l’amour de soi, qui le porte à survivre, et la pitié, qui le porte à compatir aux souffrances des autres êtres vivants (hommes et bêtes).

Mais il ne forme aucun projet engageant avec autrui des rapports volontaires de réciprocité. Comment y parviendrait-il ? Il n’a conscience ni de son existence, ni de celle des autres hommes. Il se borne à sentir et éprouver. Rousseau précise ainsi ce portrait  : « Concluons qu’errant dans les forêts, sans industrie, sans parole, sans domicile, sans guerre et sans liaison, sans nul besoin de ses semblables comme sans nul désir de leur nuire […] l’homme sauvage, sujet à peu de passions et se suffisant à lui-même, n’avait que les sentiments et lumières propres à cet état ; qu’il ne sentait que ses vrais besoins, ne regardait que ce qu’il avait intérêt de voir, et que son intelligence ne faisait pas plus de progrès que sa vanité » (Discours sur L’origine et les fondements de l’inégalité).
c. L'instauration des sociétés et l'apparition des échanges
Les rapports sociaux se nouent lorsque les hommes sont contraints de se rapprocher à la suite d’évènements climatiques et géologiques : la surface du globe change, des contrées arides se substituent aux forêts accueillantes, l’existence devient difficile, les dangers se multiplient. Les hommes se rendent compte qu’ils ont besoin les uns des autres pour assurer leur survie et satisfaire leurs besoins essentiels. Les premiers échanges se développent sur cette base : la répartition des tâches exige entente et concertation. La culture du sol, notamment, suscite des transactions ayant trait aux biens matériels.

Mais l’institution de la propriété amènera les riches possédants à manipuler, en fonction de leurs intérêts, les rapports d’échanges. Le langage, moyen de communication, prend son essor à ce moment-là : il accompagne les diverses formes d’échange, il assure la transmission des sentiments, des passions et des idées. Il permet le développement des autres facultés humaines : l’homme socialisé est un être intelligent, doté de langage, capable de prévoir et d’organiser des projets. Il maîtrise le monde extérieur, il aménage et transforme la nature. L’invention des arts, des techniques et des sciences suppose des échanges constants entre des êtres socialisés. Toutefois l’apparition des sociétés entraîne l’apparition des inégalités culturelles et économiques. Les biens ne sont pas répartis équitablement.

2. L'homme socialisé et le nouveau contrat social
a. La socialisation et le développement des inégalités
Les rapports sociaux amènent l’homme à développer ses aptitudes intellectuelles, mais, en même temps, suscitent conflits et rivalités. L’institution de la propriété met en place une répartition injuste des terres et des fruits du sol. Les riches possédants cherchent à accumuler toujours davantage de richesses. Les pauvres, écrasés par la misère, ne cessent de convoiter les biens des riches. Les échanges s’effectuent dans ce cadre : les hommes ont perdu leur douceur et leur innocence originelles, ils sont la proie du désir de possession et du désir de paraître.

Ainsi la socialisation engendre violence et immoralité : « la société naissante fit place au plus horrible état de guerre » (Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité entre les hommes, seconde partie). La poursuite des jouissances matérielles et le goût du luxe entraînent la corruption morale de tous les membres de la société : « le luxe corrompt tout ; et le riche qui en jouit, et le misérable qui le convoite » (Discours sur les sciences et les arts). Les plus riches assurent leurs possessions grâce à un prétendu droit de propriété et les inégalités économiques sont établies au sein des communautés : ainsi le vol et l’escroquerie, qui n’existaient pas à l’état de nature, font partie intégrante de l’état social. Les possédants utilisent la puissance du discours pour manipuler les non possédants et leur faire admettre des marchés injustes et malhonnêtes. Le droit institué favorise les intérêts des riches.
b. Les désirs et les besoins de l'homme socialisé : un tableau moral négatif
Les hommes deviennent esclaves du désir de richesse. Ils dépendent matériellement les uns des autres : les riches dépendent du travail des pauvres, les pauvres dépendent de l’ordre social institué par les riches. Les hommes deviennent aussi esclaves du désir de paraître. Ils dépendent psychologiquement de l’opinion des autres.
Ainsi, pour Rousseau, les rapports sociaux mettent en place non seulement des échanges économiquement truqués, mais aussi des échanges psychologiques menteurs et dissimulateurs. Les personnalités se masquent et se travestissent. Les rapports faux et inauthentiques prennent la première place. Le langage sert davantage à tromper qu’à communiquer. Les hommes, livrés aux rapports de force, s’habituent aux tactiques de manipulation. La méchanceté et la violence règnent.

Alors que l’homme naturel est soumis à peu de besoins, l’homme socialisé est sollicité par des besoins nouveaux sans cesse croissants. Le progrès des techniques et des sciences entraîne la mise en circulation de nouveaux biens et de nouveaux services : les échanges sociaux confrontent les hommes à un monde économique favorisant toujours davantage les inégalités. La création de nouveaux besoins et le désir toujours renouvelé de jouir de nouveaux biens suscite l’avidité égoïste des possédants et l’envie jalouse des non possédants. Tous les hommes, sans exception, les riches comme les pauvres, ont perdu liberté et indépendance. Ainsi on comprend pourquoi Rousseau commence le chapitre I du Contrat Social par cette phrase : « l’homme est né libre et partout il est dans les fers » (c'est-à-dire dans les chaînes du prisonnier). Par « partout » Rousseau entend : dans toutes les sociétés qu’il a l’occasion d’observer au 18e siècle, et, plus précisément, dans la société française.
c. La reconquête de la liberté et l'instauration de l'égalité devant la loi
Rousseau ne recommande pas le retour à l’état de nature : ce n’est pas possible, car les progrès techniques et scientifiques ont changé le monde de manière irréversible. La société a développé et cultivé les aptitudes intellectuelles de l’homme : elle l’a fait passer de l’animalité à l’humanité. Il faut trouver un moyen qui puisse à la fois transformer les rapports sociaux et restaurer la liberté originelle de l’homme : ce projet, moral et politique, anime la pensée de Rousseau et fait de lui le maitre à penser de la Révolution française.

Les hommes doivent donc reconquérir leur liberté et instaurer entre eux des rapports d’égalité. Les différences scandaleuses de conditions de vie entre les riches et les pauvres doivent disparaître. Les échanges effectués doivent mettre en place des engagements réciproques fondés sur l’honnêteté et la justice. Les conventions juridiques ne doivent plus favoriser les intérêts des plus riches. Les êtres humains ne doivent plus dépendre les uns des autres. L’ouvrage le Contrat Social montre comment parvenir à la mise en œuvre de ce projet. Il s’agit de substituer au contrat truqué mis en place par les possédants un autre contrat : un contrat favorisant non plus les intérêts de quelques hommes mais les intérêts du peuple.

Pour garantir la liberté, il faut que les hommes ne dépendent plus les uns des autres, mais ne dépendent que de la loi, d’une loi juste que le peuple doit avoir pouvoir d’instituer. Pour garantir l’égalité, il faut que tous les hommes soient égaux devant la loi, et qu’aucun d’eux ne s’arroge le droit de la transgresser. Pour que ces deux conditions soient réalisées il faut que la volonté générale (celle du citoyen soucieux de la liberté et de l’égalité de tous) passe avant la volonté particulière de l’homme privé. Rousseau projette ainsi la fondation d’une communauté dégagée des intérêts égoïstes. Il s’agit de régénérer l’ensemble des échanges humains sur la base d’une authentique solidarité morale. Ainsi les sociétés humaines mettront fin à l’état de guerre qui dégrade les rapports humains. Ce nouveau contrat est à venir : il remet en cause radicalement l’organisation politique et économique des sociétés de l’Ancien Régime.

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