Objectif : connaître les contraintes et les
conventions liées au texte dramatique.
Le texte dramatique présente de nombreuses
spécificités. La plus importante est la
représentation théâtrale du texte
devant un public. Cette réunion des interprètes et
des spectateurs implique une conception particulière de
l'espace et du temps.
1. Le temps au théâtre
a. La conception classique
Il est évident que le temps consacré à la
représentation théâtrale ne peut pas
totalement se superposer avec le temps du déroulement de
l'intrigue. C'est pourquoi les auteurs classiques ont
instauré l'unité de temps qui contraint les
dramaturges à cadrer l'intrigue en
vingt-quatre heures.
Les actes représentent les moments essentiels de l'action,
les entractes marquent les pauses pendant lesquelles le temps de
l'intrigue continue à se dérouler.
Des indices permettent alors au spectateur de se rendre compte de
l'écoulement du temps (par exemple, l'alternance
jour/nuit).
b. A partir du XIXe siècle
Les romantiques entreprennent de modifier les conventions du
théâtre classique qu'ils jugent trop rigides. Ils ne
conçoivent pas qu'une action ne dure que
vingt-quatre heures. Ils délivrent donc l'action
qui dure le temps qui lui convient, sans que le temps de la
représentation en soit modifié.
c. Le théâtre moderne
Au XXe siècle, les dramaturges et les metteurs
en scène innovent en superposant totalement le temps de
l'action et celui de la représentation (par exemple, en
faisant participer activement le public).
A l'inverse, ils rompent parfois tout lien avec le temps en
mettant en scène des pièces excessivement longues
(comme Le Soulier de satin [1929] de Paul
Claudel). Toute convention est rompue au profit de
l'expérience que chacun peut faire de la
représentation théâtrale.
2. L'espace au théâtre
a. La conception classique
Les auteurs classiques considéraient que la scène
ne pouvait pas représenter plusieurs lieux. Par
conséquent, la pièce de théâtre est
alors contrainte à l'
unité de lieu. Le
décor figure ce lieu où les personnages
apparaissent à tour de rôle.
Le spectateur sait où se déroule l'action par
différents moyens : des éléments du
décor, les costumes des personnages, les discours des
personnages, etc.
En outre, la tragédie classique doit obéir
à la règle des trois unités :
l'unité de temps, de lieu et d'action. Nicolas Boileau
définit bien cette règle dans son Art
poétique (1674) :
« Qu'en un lieu, qu'en un jour, un seul fait
accompli
Tienne jusqu'à la fin le
théâtre rempli. » (Chant III.)
b. A partir du XIXe siècle
De même que l'acte peut représenter une durée
variable, la scène peut représenter
différents lieux. Les romantiques affranchissent donc
le drame de l'unité de lieu au profit d'une grande
diversité. Le décor est changeant, le lecteur se
promène sans bouger, guidé par les personnages. Les
dramaturges du XIXe siècle, qui
prônent un certain réalisme, ne conçoivent
pas que tous les personnages passent par le même lieu pour
s'exprimer.
c. Le théâtre moderne
Libre de toute convention, le théâtre moderne a
tendance à supprimer toute notion de lieu (et parfois
aussi de temps, comme dans le « théâtre
de l'absurde »). La scène devient une sorte
d'endroit neutre, où le décor symbolise plus
les rapports humains, une atmosphère, qu'un lieu
précis.
L'essentiel
Au théâtre, la notion de temps et de lieu est
double. Toutes deux existent dans l'intrigue et
dans la réalité de la
représentation théâtrale. Le spectateur
suit les conventions qui mettent en place le cadre
spatio-temporel, de sorte qu'il comprend le déroulement
de l'intrigue. Mais au fil des siècles, les
conventions disparaissent au profit d'expériences
qui libèrent le texte théâtral des
contraintes de la représentation du temps et de
l'espace.