La science n'a-t-elle pour objet que des êtres matériels ?
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Savoir si la science n'a pour objet que des êtres matériels
- La science dite expérimentale ne concerne pas la philosophie, cette dernière étant axée sur l'esprit.
- La science n’a pas pour objet que des êtres matériels : elle devient alors une « science de l’homme ».
Le terme de « science » pose d’emblée un problème, dans l’optique qui est celle de la question posée. D’après l’étymologie latine du terme, le terme de science (scientia dérivé de scire, qui signifie « savoir ») désigne l’ensemble des connaissances humaines. La science a même pu être assimilée à une habileté technique, à un savoir-faire. Elle est liée à la recherche de la vérité.
La science a longtemps été
égale à l’activité
philosophique elle-même, aux investigations
spéculatives de l’esprit humain :
science et philosophie étaient une seule et
même chose.
Devenue synonyme de
« raison », elle acquiert,
au Moyen Âge, son autonomie par rapport à
la théologie, qui repose, elle, essentiellement
sur la foi. Peu à peu, la science,
c’est-à-dire la philosophie, devient donc
une discipline indépendante. La
révolution scientifique, qui
s’opère, telle que nous la concevons
aujourd’hui, dès le XVIIe
siècle, va modifier le sens du terme : la
finalité de la science moderne est de
comprendre la nature, c’est-à-dire
de comprendre les « êtres
matériels ».
On peut dire que le projet scientifique devient alors le projet de « se rendre comme maître et possesseur de la nature », selon la célèbre formule de Descartes dans le Discours de la méthode. C’est ainsi que progressivement, la science s’émancipe à son tour de la philosophie, pour s’occuper essentiellement de la nature, de la matière, et non de l’esprit. À la question : « À quoi reconnaît-on qu’une connaissance est scientifique ? », la réponse apportée sera, au XIXe siècle : « À la possibilité de contrôler cette connaissance par l’expérience ». Ainsi, tout ce qui échappe au contrôle expérimental se trouve d’emblée hors du champ de la science. À ce titre, la philosophie ou l’histoire, considérées comme des disciplines autonomes, ne peuvent satisfaire les critères qui devenus ceux de la science expérimentale. On ne peut en effet traiter un événement historique, par exemple, comme on traite un phénomène physique. Cela ne signifie pas pour autant que l’histoire n’est pas une science.
Selon qu’elles traitent des
« êtres
matériels » ou des
« êtres
spirituels », les sciences se
répartissent donc en deux catégories.
Nous pouvons qualifier d’« êtres
spirituels » ces
« objets » particuliers que sont
les phénomènes ayant un rapport avec
l’activité de l’esprit humain.
C’est ainsi que nous nommons
« sciences humaines », ou
« sciences de l’homme » ces
sciences qui prennent l’homme pour objet,
en tant qu’il est non pas corporel, naturel, mais
pensant et agissant. On ne peut pas en
effet étudier les phénomènes
physiques comme on étudie les
phénomènes psychiques. Or, la
philosophie, la sociologie, l’histoire, la
psychologie, l’anthropologie (mais aussi tout ce
qui relève de la production littéraire et
artistique, par exemple) doivent-elles être
exclues du champ scientifique sous prétexte
qu’elles ne peuvent pas être
traitées avec les mêmes méthodes
qui sont celles de la physique, de la médecine,
de la biologie, ou de la chimie ?
La distinction établie entre des
« sciences exactes » et des
« sciences humaines » n’a
finalement été rendue possible que par le
dépassement du scientisme, ou du
positivisme, courant de pensée dont on
considère qu’Auguste Comte (1798-1857) fut
le fondateur.
Auguste Comte est en outre l’inventeur de la
sociologie (le terme est utilisé par lui,
pour la première fois, en 1839) ; son
ambition est en effet de proposer, de concevoir et
d’expliquer la société à
partir d’une méthode nouvelle, à
partir d’une « méthode
positive », qualifiée initialement de
« physique sociale ». Les
phénomènes sociaux sont aux yeux de Comte
bien particuliers, et doivent faire l’objet
d’une discipline distincte des autres (et
notamment de la philosophie). Il veut en fait
établir sur des bases véritablement
scientifiques l’étude des
phénomènes de
société : en ce sens, il
prétend que ces phénomènes sont
des phénomènes naturels comme les autres.
Émile Durkheim (1858-1917), dans la même
perspective, veut appliquer la méthode des
sciences de la nature à l’étude des
« faits sociaux » ;
c’est pourquoi, dira-t-il, il faut
« traiter les faits sociaux comme des
choses », lesquels méritent le
même type d’investigation rigoureuse et
rationnelle utilisé pour les
« vraies » sciences. En voulant,
donc, faire de la sociologie une « science
positive », Comte ambitionne en fait
d’en faire ce que nous appelons maintenant une
« science exacte ».
Wilhelm Dilthey (1833-1911), bien
qu’influencé par la pensée de
Comte, conteste ce positivisme scientiste, en
établissant que les méthodes
employées pour connaître les
« choses de la nature » ne
peuvent être les mêmes que celles mises en
œuvre pour connaître les
« choses de l’esprit ».
Max Weber (1864-1920) s’oppose également
à Comte et à Durkheim, en montrant que
les faits humains ne sont pas des faits naturels, mais
culturels. Il propose de traiter ces faits selon
une méthode
« compréhensive »,
à la manière de Dilthey, et non plus
selon une méthode basée sur un
schéma
« explicatif » : ne
renonçant pas à rechercher une
causalité des faits sociaux, la méthode
compréhensive s’efforce néanmoins
de comprendre le sens de ces faits ; ils doivent
donc être interprétés.
L’histoire est à ce titre une science
interprétative.
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