Durant la période
médiévale, l'autorité royale, en France, a eu
le plus grand mal à s'imposer : le roi n'était
pas si puissant face à certains seigneurs, riches
- parfois davantage que lui - et ambitieux. Mais à
partir du 13e
siècle, elle commença à
s'affirmer progressivement, avançant durant certaines
périodes, reculant ou s'éclypsant à
d'autres.
À partir du 16e
siècle, les terribles guerres de Religion qui
déchirèrent les catholiques et les
protestants français et européens,
contribuèrent à mettre la monarchie en
difficulté. Ce violent conflit fournit à
certaines grandes familles l'occasion de tenter de mettre en
tutelle la monarchie affaiblie.
Pourtant, un siècle plus tard, un roi, que l'on qualifie
aujourd'hui « d'absolu
», régnait sur la France. Et plus
personne, pas même les Grands du royaume, n'était
en mesure de contester son autorité.
Que s'est-il passé pour que les choses évoluent
à ce point ?
1. La lente émergence du « princeps legibus
solutus », du « prince délié des
lois »
De 1562 à 1598,
huit guerres de Religion se
succédèrent en France, entrecoupées de
trêves précaires. Le pays était
dévasté, le pouvoir royal en grande
difficulté.
a. Le massacre de la Saint-Barthélémy,
une tentative de rétablissement de
l'autorité royale
Le 24 août 1572, jour de la Saint-Barthélemy, Charles IX
et sa mère, Catherine de Médicis,
déclenchèrent le massacre des
protestants parisiens. Au départ, seuls
les chefs militaires du clan huguenot
étaient visés par l'ordre royal, et le jour
même, Charles IX ordonna l'arrêt
immédiat des tueries. Ce qu'il voulait,
c'était défendre le pouvoir royal
malmené par ces luttes entre factions religieuses
et ramener la paix dans le royaume. Mais le peuple
catholique fanatisé continua ses massacres
plusieurs jours durant. Très vite, l'élan
dévastateur se propagea à une vingtaine
d'autres villes. La monarchie n'était pas encore
assez puissante pour parvenir à
l'arrêter. On estime que cet
événement dramatique fit près de
30 000 morts dans l'ensemble du
pays.
b. L'édit de Nantes, manifestation de la
puissance royale
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Doc. 1. L'Edit de Nantes
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L'édit de Nantes, signé
par Henri IV le 13 avril
1598 mit fin à 40
ans de guerres civiles ponctuées de massacres en
imposant, pour la première fois, le roi comme
arbitre au-dessus de tous les partis et en accordant la
liberté de conscience aux protestants. Cet
édit, unique en Europe, visa à
pacifier la France en permettant
qu'y coexistent les deux confessions,
chacune dotée des mêmes droits, au
sein d'un Etat catholique.
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Doc. 2. Portrait du roi Henri IV
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2. Louis XIV, modèle du « roi absolu
»
a. Un roi mineur et traumatisé par la Fronde
À la mort de Louis XIII (1643), son successeur, le
futur Louis XIV, étant mineur, sa mère,
Anne d'Autriche devint régente du royaume
et le cardinal Mazarin Premier ministre. De
1648 à 1653, ils durent faire face à un
soulèvement général, la Fronde, qui unit contre Mazarin
le parlement de Paris, les parisiens
excédés par les impôts et les
Grands du royaume. Le cardinal-ministre finit par
l'emporter, mais durant ces troubles, le jeune Louis XIV
vécut des moments très difficiles.
b. Un roi qui choisit de gouverner seul
Louis XIV devint roi de France en 1651. Il avait alors 13
ans et venait d'être déclaré majeur.
Traumatisé par la Fronde, il annonça
en 1661 (après la mort de Mazarin) à
son
Conseil des ministres que, désormais,
il exercerait seul et pleinement
son métier de roi, sans Premier
ministre. Sa décision causa un véritable
choc, sa mère tenta de lui imposer sa
présence au Conseil, mais jamais il ne changea
d'avis.
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Doc. 3. Portrait de Louis XIV
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Comme tous les rois de France, Louis XIV, par le
sacre, était
roi de
droit divin. Il considérait donc qu'il
n'avait aucun compte à rendre à qui que ce
soit sur la Terre et entendait exercer sur toute chose un
pouvoir absolu,
c'est-à-dire sans limite.
C'est lui qui faisait la loi en prononçant des
édits et des ordonnances. Il se faisait aider
à gouverner et à administrer son royaume
par son conseil qui était chargé de
préparer les dossiers, mais sans donner leur avis,
ou alors seulement s'il le leur demandait.
c. Un roi qui mit au pas son royaume
Il ne toléra aucune opposition. Sous son
règne, les grands seigneurs furent habilement
réduits à l'impuissance et
surveillés de près : invités
à résider à Versailles et obligés d'y
respecter une étiquette très
stricte, ils acceptèrent de se transformer en
courtisans soumis, afin
de bénéficier des rentes et des pensions que le roi
leur accordait en échange de leur
obéissance. Ainsi, bien qu'exclus du pouvoir, ils
ne cherchèrent plus à se
révolter.
Mais si le roi Soleil
récompensait ceux qui le servaient
fidèlement, il punissait également
sévèrement ceux qui contestaient son
autorité ou lui déplaisaient. Il
pouvait, par exemple, en signant des lettres de cachet faire
arrêter et emprisonner quelqu'un de façon
totalement arbitraire, c'est-à-dire sans
jugement. C'était là l'une des
manifestations de son pouvoir absolu.
3. Une monarchie moins absolue que prévue
Malgré tous les efforts de Louis XIV, la monarchie
française du 17e siècle, ne fut
jamais totalement absolue. Les pouvoirs du roi
étaient tout de même limités par le
fait qu'il devait respecter ce que l'on appelait
les lois fondamentales du
royaume : par exemple, il ne pouvait pas choisir
son héritier qui devait impérativement
être son plus proche parent masculin, il était
obligatoirement catholique (Henri IV, qui
était protestant, dut se convertir pour pouvoir
devenir roi) et n'avait pas le droit d'abdiquer. Enfin et
surtout, il ne pouvait rien contre les lois coutumières (qui
remontaient au Moyen âge) du royaume qui
étaient fort nombreuses et, souvent, embarrassantes
pour lui.
L'essentiel
Tout au long de la période médiévale,
les rois capétiens ont eu le plus grand mal
à assoir leur autorité sur les grands
seigneurs, bien souvent plus riches et plus puissants
qu'eux. La guerre de Cent Ans et les guerres de
Religion ne firent qu'aggraver les choses. Les grandes
familles de la noblesse avaient pris parti pour l'un ou
l'autre camp (huguenot ou catholique) et, durant de longues
années, le royaume fut déchiré et
ravagé par ce conflit. Les rois ne parvinrent plus
à assoir leur autorité et à s'imposer
comme souverains à leurs sujets et à certains
familles de la noblesse.
En promulgant l'Edit de Nantes en 1598, Henri IV
ramena la paix dans le royaume et affirma ainsi clairement
les prétentions de la monarchie française de
trancher au-dessus des partis. Plus tard, le jeune Louis XIV,
traumatisé par l'épisode de la Fronde
qui opposa le premier ministre, Mazarin au Parlement
de Paris et à la noblesse, attendit que le cardinal
meure pour annoncer à son Conseil que
désormais il entendait gouverner seul. Ce fut un
changement dans la politique royale, qui en suffoqua plus
d'un, mais annonça une ère nouvelle où
le monarque entendait être absolu, obéi
de tous, même, et surtout, de la noblesse, qui fut mise
au pas. Nul ne prenait plus le risque de contrarier ou de
trahir le roi car ceux qui le firent s'en mordirent les
doigts.