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Buñuel, Cocteau

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Objectif :
Déterminer les préoccupations communes à Luis Buñuel et Jean Cocteau, sans négliger leurs points de divergence ; Mesurer le traitement qu'ils réservent au montage en relation avec leurs objectifs esthétiques ou poétiques.
Luis Buñuel a réalisé plus d'une trentaine de films, de 1928-1929 (Un Chien andalou, avec la participation de Salvador Dali) à 1977 (Cet obscur objet du désir), à travers le monde (surtout en France, en Espagne et au Mexique).

Ses œuvres, malgré leur diversité (il est passé par l'onirique, par le réalisme, notamment avec Los Olvidados en 1950, par le documentaires, tel Terre sans pain en 1932), sont toujours militantes, voire subversives, et mettent en lumière le désir frustré par la Loi.

Jean Cocteau (dont on a fêté en 2003 le quarantième anniversaire de la mort) partage cet onirisme. Les thèmes du rêve et du désir traversent ses œuvres qui touchent au théâtre, à la littérature, à la peinture. 

Loin de disperser son travail, toutes ces disciplines l'enrichissent. Cocteau les appréhende avec la démarche du Poète dont il veut être l'incarnation. La variété des arts auxquels il s'est consacré explique pourquoi il n'a réalisé lui-même que six films de 1930 (Le Sang d'un poète) à 1959 (Le Testament d'Orphée). Certains textes (romans ou scénarios) ont été adaptés par d'autres cinéastes : Les Enfants terribles par Jean-Pierre Melville en 1949 et L'Eternel retour par Jean Delannoy.
1. Un contexte commun : le surréalisme
Les premières œuvres des deux artistes partagent de nombreux points communs : le plus évident étant leur quasi simultanéité. Luis Buñuel réalise en effet Un chien andalou en 1928-1929 tandis que Jean Cocteau crée Le Sang d'un poète en 1930.

La forme des deux films est très proche, on a ainsi reproché à Cocteau d'avoir voulu imiter le chef-d'œuvre de Buñuel. Il a démenti ces accusations en certifiant qu'il n'avait pas vu ce film avant sa propre réalisation et qu'il ne le découvrit d'ailleurs qu'après L'Âge d'or, deuxième film de Buñuel (1930). Si ces deux films novateurs se ressemblent, c'est probablement parce qu'ils sont surtout le produit d'une époque très féconde d'un point de vue culturel, une période marquée par l'influence incontournable du surréalisme.
 
La fin de la Première Guerre mondiale accompagne des bouleversements artistiques, dont le cubisme en peinture, la musique de Satie et le surréalisme. Le surréalisme fait de l'intimité du sujet l'objet de sa quête. Rimbaud et Lautréamont en sont des pères spirituels, Dada le mouvement transgressif annonciateur, et André Breton le fondateur. Ce dernier publie son Manifeste du surréalisme en 1924 ; un deuxième Manifeste sortira en 1930 alors qu'une partie du groupe prend un tournant politique (scission encouragée notamment par Aragon et Eluard). Plus généralement, le surréalisme vise un objectif décisif : il s'agit de libérer la création artistique de l'autorité de la raison et de la logique.

La psychanalyse joue un rôle essentiel, elle a montré la voie qui mène à l'Inconscient, franchit les limites de la censure pour retrouver, au-delà de la raison et des interdits sociaux, une réalité pulsionnelle de l'être. Les surréalistes empruntent ses voies : la raison étant représentée par le langage (syntaxe, grammaire, signification), il faut la combattre en le transgressant. L'écriture automatique (écrire ce qui passe par la tête sans passer par la raison ni la logique) est une possibilité.

D'autres poètes donnent à leurs œuvres l'allure d'un rêve non rationnel : le rêve appartient davantage au pulsionnel, il révèle les désirs profonds de l'être. Si Un chien andalou et L'Âge d'or se ressemblent, c'est parce qu'ils défient la raison sont très oniriques.

Le montage participe à cette transgression du monde de la logique, et renforce la dimension onirique des films. Malgré des différences de rythme assez nettes entre les deux films (celui de Buñuel étant plus rapide que celui de Cocteau), ils réservent les mêmes surprises. D'un plan à l'autre, les faux-raccords sont innombrables. Un choc peut naître de la juxtaposition de deux plans, et la continuité ne réside pas dans le récit mais dans l'intensité particulière de la juxtaposition.

Au début d'Un chien andalou, deux plans se font écho : un nuage dans le ciel passe devant la lune et la fend, un homme relève la paupière d'une jeune femme et tranche l'œil d'un bœuf avec son rasoir, les deux scènes rassemblées par le gros plan.

Le montage ne donne pas l'illusion que l'œil de la femme a été incisé (la tête de boeuf est visible), mais l'émotion ressentie est la même. Du nuage à l'œil tranché, un cycle d'images a été parcouru : le geste est le même, c'est une répétition de figures similaires assurée par un montage des correspondances. L'image commande la suivante (puisqu'elles se ressemblent), la raison est éjectée.

Le style est plus important que l'idée, il produit ses propres effets et agit sur l'émotion du spectateur
. Une image en appelle une autre comme dans un rêve (sans liaison). La succession est angoissante ou agréable, mais elle n'est surtout pas inféodée au récit.

Dans Le Sang du poète, un peintre efface la bouche d'un de ses portraits, mais la bouche se greffe alors dans sa paume et se met à lui parler.

Elle l'exhorte à pénétrer dans son propre monde imaginaire. La porte qui lui permet d'entrer dans ce monde est un miroir (symbole de la duplicité, de l'imaginaire) : il s'approche de ce miroir, puis dans le plan suivant, le miroir s'est liquéfié, le peintre-poète plonge littéralement dans un monde de rêves, tandis que le miroir s'est refermé derrière lui.

Le montage a donc assuré le passage du réel à l'imaginaire
. Ensuite, il apporte d'étranges visions (grâce à des champs-contrechamps), toutes sortes d'apparitions soudaines (notamment celle de l'hermaphrodite à partir de trucages à la Méliès). Les faux-raccords sont très présents, mais on remarque que même les raccords plus codés donnent lieu à des visions teintées d'irréalité (une petite fille qui se déplace sur un plafond, un mexicain fusillé deux fois grâce à montage inversé). Le montage ne s'interdit pas la liaison, mais celle-ci s'autorise des hiatus, comme dans un rêve (exemple : Maya Deren).

Du point de vue du montage sonore, Cocteau pratique ce qu'il appelle le synchronisme accidentel. Georges Auric avait composé la musique en plusieurs séquences en phase avec les scènes. Cocteau a changé l'ordre de ces séquences pour perdre délibérément le contrôle des images et du son (il lutte contre sa volonté consciente d'auteur dans son œuvre, et suit ici l'un des préceptes surréalistes). 
2. Au-delà du surréalisme
Si Cocteau et Buñuel ont réalisé leurs premiers films dans l'esprit du surréalisme, ils ont su s'en dégager. Avec le temps, leurs films ont gagné en lisibilité, ils se sont bâtis sur une diégèse plus solide.

Le désir frustré reste une thématique prépondérante : il encourage des fantasmes qui s'insèrent dans le prétendu réel (Belle de jour, Buñuel, 1966), il favorise l'apparition d'images oniriques dans des miroirs, ou lors de plans au ralenti (La Belle et la Bête, Orphée, Le Testament d'Orphée de Cocteau).

À la différence des premiers films, la rupture est moins nette entre le réel et le rêve (les contes de Cocteau sont des récits bien articulés par le montage, il considérait son oeuvre comme le « documentaire réaliste d'événements irréels »). Le rêve habite le réel, il loge dans ses profondeurs, tout comme l'Inconscient et le pulsionnel affleurent sous la surface du visible. Même les métaphores sont ressaisies par le récit, à rebours.

Dans El (Buñuel, 1952), lors du baiser entre Francisco et Gloria, une autre image s'impose : une explosion dans un chantier (symbole de l'effusion du plaisir entre les amants).


On voit ensuite Raul, le fiancé de Gloria, qui travaille sur le chantier. Il rentre chez lui, croise la jeune femme qui monte dans sa voiture. Elle lui fait le récit de ce qui s'est passé du baiser à l'explosion, on comprend que plusieurs années ont passé. Elle révèle l'ellipse temporelle que cachait la métaphore, ce qui surprend le spectateur.

Un jeu subtil et intense s'établit entre le montage narratif (l'ellipse) et le montage métaphorique
. L'usage du fondu au noir (passage du temps), étant un code, n'aurait pas eu le même impact.
L'essentiel
Luis Buñuel et Jean Cocteau débutent conjointement leur carrière cinématographique autour de 1930. Leurs œuvres sont alors très marquées par le surréalisme (le refus de la raison et du récit au profit d'une spontanéité poétique, d'une juxtaposition d'images – Cocteau s'épanouit d'autant plus dans cette veine par son ignorance totale des codes et des techniques cinématographiques).

Le montage peut court-circuiter la signification, et désorganiser l'espace et le temps du récit (faux-raccord, montage des correspondances).

Avec les années, le montage traitera sur un même plan deux images hétérogènes (aspects narratif et métaphorique). Quand l'un recouvre l'autre sans le faire disparaître, le métaphorique et le réel peuvent cohabiter et produire des effets très intenses sur le spectateur.

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