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« Madame Bovary », Gustave Flaubert : Lecture méthodique 3 - La mort d'Emma

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Objectif
Aborder une thématique importante du roman et en comprendre les enjeux.
Le roman Madame Bovary, de Gustave Flaubert, a été créé à partir de deux cas véritables d’empoisonnement. Il est paru en 1857, après un travail acharné et douloureux de presque 5 années de rédaction et un procès devant la 6e chambre correctionnelle pour « outrage à la morale publique et religieuse et aux bonnes mœurs ».
Flaubert est finalement acquitté et le procès assure le succès du roman, permettant à Madame Bovary de se hisser au rang de classique de la littérature française.

L’extrait choisi ici – la scène de l’agonie d’Emma – se situe dans la IIIe partie, au chapitre VIII, depuis « Le prêtre se leva pour prendre le crucifix » jusqu’à « Elle n’existait plus ».

Au moment où Emma comprend que ses dettes vont être révélées, elle tente en vain de trouver de l’argent et sollicite tour à tour Maître Guillaumin, Binet et Rodolphe. Son échec la conduit sur la seule voie qui lui reste : le suicide. Elle dérobe donc dans la réserve d’Homais de l’arsenic, qu’elle avale aussitôt sous le regard épouvanté de Justin qui lui a ouvert la porte.
1. La théâtralisation de la mort
a. Les trois temps de la mort
L’extrait se présente en trois temps, comme les trois coups au théâtre, durant lesquels progresse l’agonie d’Emma, qui est rythmée par les étapes du rite funèbre mais aussi par les différents sentiments éprouvés par la jeune femme.

lignes 1 à 16 : Le temps de l’extrême onction
Cette partie s’ouvre sur le personnage de Bournisien, le prêtre, avec l’utilisation du passé simple « se releva » qui indique le début d’une action.
Paradoxalement, il est marqué par le champ lexical de la volupté : « baiser d’amour », « convoité », « friande », « senteurs amoureuses », « luxure », « délectait », « assouvissement de ses désirs ».

lignes 17 à 27 : Le temps du dernier éveil
Ce deuxième temps débute avec le connecteur logique « cependant ». Il évoque les « bénéfices » de l’extrême onction, on peut lire une certaine sérénité sur le visage d’Emma, et se termine par de grosses larmes lorsqu’elle se regarde dans un miroir.

lignes 28 à la fin : Le temps de la fin
Enfin, ce troisième mouvement qui décrit l’agonie, juste interrompue par la chanson allégorique de l’Aveugle.
C’est le temps de l’effroi et de l’épouvante : « pâlissait », « effrayante », « souffle furieux ».

 Doc.1. « La mort d'Emma Bovary », peinture d'Albert Auguste Fourié
b. Une scène écrite pour le théâtre
• Cette scène s’apparente à un spectacle : le public est présent à travers les yeux des personnages qui ne sont là que pour observer.

L’Aveugle, personnage hautement théâtral, accompagne les derniers instants d’Emma.

• Les observations du narrateur omniscient se succèdent et ressemblent à des didascalies : Félicité « s’agenouilla devant le crucifix », le pharmacien « fléchit un peu les jarrets », Bournisien « s’était remis en prière », et enfin Charles prend les mains d’Emma.

• L’effet théâtral est accentué par le fait que chacune de ces phrases commence par le nom du personnage concerné.
c. Des éléments de comédie
• Le prêtre fait remarquer à Charles « la sérénité » d’Emma : « Le prêtre ne manqua point d’en faire l’observation » comme s’il s’agissait d’une expérience à caractère scientifique.

• La mention des « jarrets » d’Homais qui évoque également la précision scientifique et ce terme s’applique davantage à un animal qu’à un homme.

• L’extrême-onction n’offre qu’un apaisement de courte durée, Bournisien se doit de fournir des explications qu’il voudrait rationnelles : « le Seigneur, quelquefois, prolonge l’existence des personnes quand il le jugeait convenable pour leur salut ».
d. Les éléments de tragédie
La souffrance de Charles « tressaillant », « comme aux coups d’une ruine qui tombe ».

Le champ lexical de la mort : « force expirante », « la moribonde », « déjà morte », « un cadavre », « elle n’était plus ».

Le pathétique avec la présence des larmes : « de grosses larmes », « sanglots étouffés de Bovary ».

On a sous les yeux le tableau saisissant, presque fantastique de l’effroi et de l’épouvante, tout est décrit de son agonie : les yeux qui roulent, la langue tirée, l’effrayante accélération des côtes.

• La réaction d’Emma à l’intervention de l’Aveugle : le rire, « atroce, frénétique », face à l’Aveugle « qui se dressait dans les ténèbres éternelles comme un épouvantement ». Le dernier rire n’est plus celui de l’ironie, mais bien l’expression du tragique terrifiant.

L’Aveugle est l’allégorie du destin, de la fatalité. Son expression hideuse, son irruption presque surnaturelle, son infirmité en font un personnage de la tragédie antique ; il évoque Tirésias, le voyant aveugle.

La tragédie est complète dans cette scène où se mêlent le pathétique, l’effroi et le Destin.
2. L’écriture réaliste de la mort et de l’extrême-onction
a. Les étapes de l’agonie
• Une description violente et physique des symptômes de la mort : « haleter », la « langue tout entière » qui « sort de la bouche », des yeux qui « roulent », l' « accélération de ses côtes, secouées par un souffle furieux », « la prunelle fixe, béante » ; le texte s'achève sur une « convulsion ».

• La référence aux différentes parties du corps (« poitrine », « langue », « yeux ») donne l’impression que le corps agit seul : la langue « lui sortit hors de la bouche » et les côtes sont « secouées par un souffle furieux », avec une forme verbale au passif qui amplifie cette impression de perte de contrôle d’Emma sur son propre corps.

• La mort gagne progressivement, entraînant une séparation de l’âme et du corps notamment dans la seconde partie : « comme si l'âme eût fait des bonds pour se détacher ».

• Il est intéressant de noter que l'instant de la mort n'est pas décrit, on lit simplement que cela s’est passé. La phrase « Elle n'existait plus » permet de faire une sorte d'ellipse.
b. Le rituel de l’extrême-onction
Le déroulement exact et réaliste de l’extrême-onction : les différentes étapes sont marquées par une série de connecteurs logiques qui mettent davantage l’accent sur l’ordre et le détail que sur le sens du rituel : « alors », « ensuite », « d’abord », « puis », « enfin ».

Les termes latins mêlent le discours du prêtre et celui du narrateur, et marquent une distance par rapport à la religion (celle de Flaubert avec la religion).
On note également dans ce passage l’omniprésence des termes appartenant au registre de la religion : « sacrement », « prêtre », « Seigneur », « salut », « communion », « âme », « crucifix », « prière », « soutane », « ecclésiastique », « oraisons », « syllabes latines ».

L’importance des détails prosaïques : « trempa son pouce droit dans l’huile », « jeta dans le feu les brins de coton trempés d’huile ».
3. La mort d’une héroïne
a. La mort de la femme amoureuse
Alors qu’elle agonise, l’Aveugle – ce personnage qu’elle croisait lorsqu’elle partait à Rouen rejoindre Léon, et qui l’a toujours épouvantée – réapparaît, par l’intermédiaire de sa chanson. Cela provoque une réaction extrêmement violente d’Emma, qui « se releva comme un cadavre que l’on galvanise, les cheveux dénoués, la prunelle fixe, béante. »

La chanson de l'Aveugle est un rapide résumé de la vie d'Emma : les « rêves d'amour » d’une fillette, les « épis » amassés comme les amants d'Emma, le vent qui souffle sur le jupon qui s'envole évoque une image de légèreté et enfin la « faux » de la mort qui « moissonne ».
b. La mort de la femme qui a péché
La mort d’Emma prend la forme de la disparition de la volupté et de la jouissance. On note l’importance du champ lexical de la volupté ainsi que le lien explicite entre les parties du corps et les caractéristiques sensuelles : « yeux » qui « convoitent », « narines » « friandes… de senteurs », « bouche » qui s’est « ouverte », qui a « gémi » puis « crié ».
c. L’héroïne : entre baiser mystique et rire diabolique
La scène du crucifix et le dernier baiser (« elle y déposa de toute sa force expirante le plus grand baiser d’amour qu’elle eût jamais donné ») permettent à Emma de sublimer le rituel amoureux, laissant de côté les amours adultères et faisant du baiser mystique le seul qui réellement puisse compter.
On pourrait croire qu’Emma meurt en sublimant sa vie, en la maîtrisant, mais en éprouvant également des sentiments vrais pour la première fois.

Cependant, lorsqu’elle entend l’Aveugle, Emma est prise de folie : « Emma se mit à rire, d'un rire atroce, frénétique, désespéré ». On note qu'Emma semble prendre une apparence « diabolique ».
4. La critique de la société bourgeoise
• Dans ce passage, on lit aussi le regard critique que Flaubert pose sur la société bourgeoise dans laquelle il vit, notamment à travers les personnages secondaires qui assistent à l’agonie d’Emma, tels que M. Homais et M. Canivet qui n’ont aucun intérêt, ni aucune compassion à son égard.
Ils sont présents dans la chambre d’Emma pour se montrer, ce que le narrateur met en évidence en décrivant leur attitude de façon ironique et moqueuse : « le pharmacien lui-même fléchit un peu les jarrets ».

• De même, l’ironie se perçoit dans l’attitude prêtée à M. Canivet, qui « regardait vaguement sur la place ». L’adverbe « vaguement » montre l’indifférence de l’homme vis-à-vis de la mourante.

• L’ironie est perceptible également dans l’attitude du prêtre qui « s’était remis en prière ».

• Le roman se termine par le triomphe d’Homais, après la mort de Charles et le placement de Berthe.
L'essentiel
Le roman Madame Bovary est paru en 1857, après 56 mois de travail acharné, et un procès devant la 6e chambre correctionnelle pour « outrage à la morale publique et religieuse et aux bonnes mœurs ».

Cet extrait apparaît comme une tragédie réaliste : il contient de nombreux éléments réalistes, notamment dans la précision de la description de l’agonie d’Emma, qui n’épargne aucun détail au lecteur.
L’aspect tragique est très présent, la mort d’Emma étant annoncée et inéluctable, notamment à travers la chanson de l’Aveugle. Toutefois, l’ironie et la moquerie du narrateur sont également présentes et servent la critique effectuée par l’auteur de la société bourgeoise de l’époque.

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