L'anarchisme classique
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Étymologiquement, l’« anarchisme » est un terme
provenant du grec arkhê
(« pouvoir » ou
« commandement ») ; il
désigne un courant d’idée prônant
l’absence d’autorité politique ou
l’absence d’État. Dans un sens plus
péjoratif, l’anarchisme est synonyme
d’absence d’ordre et de lois, engendrant
inévitablement le chaos.
L’absence d’État a pu être observée chez certains peuples dits « premiers », qui sont considérées, selon la formule de Pierres Clastres (ethnologue français mort en 1977), comme des « sociétés sans État ». Elles ne peuvent néanmoins être considérées comme des sociétés anarchistes, au sens où nous comprenons ce terme aujourd’hui.
L’absence d’État a pu être observée chez certains peuples dits « premiers », qui sont considérées, selon la formule de Pierres Clastres (ethnologue français mort en 1977), comme des « sociétés sans État ». Elles ne peuvent néanmoins être considérées comme des sociétés anarchistes, au sens où nous comprenons ce terme aujourd’hui.
1. L'anarchisme classique
a. L'origine du courant anarchiste
Le courant anarchiste, à son origine,
s’exprime à travers les œuvres de
William Godwin,
philosophe et journaliste britannique (1756-1836), de
Pierre-Joseph Proudhon,
philosophe et homme politique français
(1809-1865), de Mikhaïl Bakounine,
(1814-1876) et de Piotr Kropotkine (1842-1921),
théoriciens anarchistes russes.
Les anarchistes classiques défendent en premier lieu l’idée de liberté, laquelle justifie que l’on reconnaisse à l’individu le pouvoir suprême ; c’est en ce sens que l’anarchisme est qualifié d’« individualisme ». Valeur transcendante, la liberté sera pleinement réalisée lorsque l’État aura été détruit. Il va de soi que la volonté de supprimer l’État est directement inspirée par l’idée que tout État s’attache à détruire les libertés individuelles. L’État et les individus ont des intérêts fondamentalement opposés, selon les anarchistes classiques.
Les anarchistes classiques défendent en premier lieu l’idée de liberté, laquelle justifie que l’on reconnaisse à l’individu le pouvoir suprême ; c’est en ce sens que l’anarchisme est qualifié d’« individualisme ». Valeur transcendante, la liberté sera pleinement réalisée lorsque l’État aura été détruit. Il va de soi que la volonté de supprimer l’État est directement inspirée par l’idée que tout État s’attache à détruire les libertés individuelles. L’État et les individus ont des intérêts fondamentalement opposés, selon les anarchistes classiques.
b. William Godwin
Godwin s’inspire
du courant utilitariste
anglais pour asseoir les théories
développées dans son ouvrage principal,
intitulé Enquête sur la justice politique
et son influence sur le bonheur et sur la vertu en
général (1793). Le raisonnement peut
paraître assez simple :
l’État, et avec lui, toute forme de
gouvernement, disparaîtront parce qu’ils sont
inutiles.
Seuls les individus sont en mesure d’apprécier, en outre, ce qui concourt à leur bonheur. Ce type d’anarchisme se rattache à la croyance selon laquelle les individus sont capables, d’eux-mêmes, d’atteindre une certaine perfection, à partir du moment où ils sont complètement autonomes ; cela signifie principalement qu’ils peuvent construire eux-mêmes leurs propres règles morales. « Pour l’État, des individus libres et autonomes sont menaçants : c’est pourquoi il cherche soit à les détruire, soit à les asservir » (George Crowder, philosophe américain contemporain, auteur de Classical anarchism, 1991 ; citation tirée du Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale, 1996, dans l'article intitulé « La réflexion morale dans les courants anarchistes »).
Seuls les individus sont en mesure d’apprécier, en outre, ce qui concourt à leur bonheur. Ce type d’anarchisme se rattache à la croyance selon laquelle les individus sont capables, d’eux-mêmes, d’atteindre une certaine perfection, à partir du moment où ils sont complètement autonomes ; cela signifie principalement qu’ils peuvent construire eux-mêmes leurs propres règles morales. « Pour l’État, des individus libres et autonomes sont menaçants : c’est pourquoi il cherche soit à les détruire, soit à les asservir » (George Crowder, philosophe américain contemporain, auteur de Classical anarchism, 1991 ; citation tirée du Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale, 1996, dans l'article intitulé « La réflexion morale dans les courants anarchistes »).
2. Critiques contemporaines de l'anarchisme classique
a. L'euthanasie du gouvernement
Michel Onfray
(né en 1959) dans un chapitre qu’il
consacre à Godwin
(L’eudémonisme social, contre-histoire de
la philosophie, Grasset, 2008), se demande pour sa
part comment on a pu faire de Godwin l’inventeur de
l’anarchisme. Le paradis qu’il se propose
de réaliser sur terre, grâce au travail de
la raison, ressemble plutôt à un enfer,
selon Michel Onfray. Godwin propose
l’« euthanasie du
gouvernement » – euthanasie
à laquelle seuls des individus épanouis et
heureux pourront procéder.
Les recettes proposées par Godwin peuvent laisser dubitatifs. Les individus de la société parfaite qu’il imagine « ne travaillent plus qu’une demi-heure par jour […] et le travail est devenu un repos agréable ». Quant au sexe, il n’est plus qu’« une vieille survivance d’un état de civilisation antérieur corrompu », montre M. Onfray : les « nouvelles relations désexualisées » sont désormais « construites sur l’amitié ou l’affection tendre ». M. Onfray voit finalement peu de bonheur ou de béatitude dans cette société désincarnée, où « la chair se voit déspiritualisée, conduite en tout par la raison pure ».
On retrouve de tels éléments (épanouissement de l’individu, prééminence de la loi morale) chez Bakounine ou Kropotkine – outre la conviction qu’ils partagent, selon laquelle l’État doit être aboli.
Les recettes proposées par Godwin peuvent laisser dubitatifs. Les individus de la société parfaite qu’il imagine « ne travaillent plus qu’une demi-heure par jour […] et le travail est devenu un repos agréable ». Quant au sexe, il n’est plus qu’« une vieille survivance d’un état de civilisation antérieur corrompu », montre M. Onfray : les « nouvelles relations désexualisées » sont désormais « construites sur l’amitié ou l’affection tendre ». M. Onfray voit finalement peu de bonheur ou de béatitude dans cette société désincarnée, où « la chair se voit déspiritualisée, conduite en tout par la raison pure ».
On retrouve de tels éléments (épanouissement de l’individu, prééminence de la loi morale) chez Bakounine ou Kropotkine – outre la conviction qu’ils partagent, selon laquelle l’État doit être aboli.
b. Critique de la démocratie et du suffrage
universel
Proudhon rejette violemment
toute idée de démocratie, dans la
mesure où celle-ci n’est pas capable de
garantir la liberté des individus. Le suffrage
universel est selon lui une
« mystification », une
« ruse » à laquelle
l’État a recours pour légitimer son
pouvoir. L’État a donc pour principale
finalité d’assujettir la majorité
des individus. Ainsi cet État
s’arroge-t-il le pouvoir de « procurer
le bien du peuple malgré le peuple »
(citation extraite de l’ouvrage
rédigé par Luc Ferry et Alain Renaut :
Philosophie politique, Partie 3 :
« Critique anarchiste et critique
marxiste »).
Proudhon disqualifie en outre la philosophie et le texte des droits de l’homme, sous le motif qu’ils impliquent, à l’instar de la démocratie, la présence de l’État. On connaît la formule de Proudhon selon laquelle « la propriété, c’est le vol ». Il s’oppose ainsi à la majorité des théoriciens de son époque, qui présentaient la propriété comme un droit naturel et sacré. Proudhon s’accorde sur ce point avec les thèses communistes de Marx, en affirmant que la richesse produite par le travail collectif des ouvriers est confisquée par les capitalistes, qui sont les « propriétaires » des outils de production. Dans cette optique, pour Proudhon, la propriété est une usurpation.
Proudhon disqualifie en outre la philosophie et le texte des droits de l’homme, sous le motif qu’ils impliquent, à l’instar de la démocratie, la présence de l’État. On connaît la formule de Proudhon selon laquelle « la propriété, c’est le vol ». Il s’oppose ainsi à la majorité des théoriciens de son époque, qui présentaient la propriété comme un droit naturel et sacré. Proudhon s’accorde sur ce point avec les thèses communistes de Marx, en affirmant que la richesse produite par le travail collectif des ouvriers est confisquée par les capitalistes, qui sont les « propriétaires » des outils de production. Dans cette optique, pour Proudhon, la propriété est une usurpation.
3. De l'anarchisme classique à l'individualisme
a. Des similitudes entre les deux courants
George Crowder,
précédemment cité, montre que la
séparation entre l’anarchisme classique et
l’anarchisme individualiste n’est pas
forcément très nette, dans la mesure
où l’anarchisme classique contient la
composante « individualiste ». En
fait, la distinction entre les tenants de ces deux formes
d’anarchisme s’établit à partir
de la conception, radicalement opposée, que les
uns et les autres se font de la
propriété.
Ainsi, lorsque Proudhon énonce que « la propriété, c’est le vol », il entend par « propriété » celle que les détenteurs du capital ont confisquée. En évoluant, les deux courants se sont beaucoup plus nettement démarqués, les anarchistes dits « classiques » prônant la collectivisation des moyens de production (communisme) et les anarchistes individualistes défendant la propriété, et les règles des échanges et du marché.
Ainsi, lorsque Proudhon énonce que « la propriété, c’est le vol », il entend par « propriété » celle que les détenteurs du capital ont confisquée. En évoluant, les deux courants se sont beaucoup plus nettement démarqués, les anarchistes dits « classiques » prônant la collectivisation des moyens de production (communisme) et les anarchistes individualistes défendant la propriété, et les règles des échanges et du marché.
b. Stirner : l'individualisme absolu
Max Stirner, philosophe
allemand (1806-1856), est le principal
représentant de l’anarchisme
individualiste (lequel s’oppose à
l’anarchisme collectiviste représenté
par Bakounine). Dans son
principal ouvrage, L’unique et sa
propriété (1845), Stirner soutient la
thèse d’un homme
« unique »,
c’est-à-dire d’un homme qui par
essence, n’est pas fait pour se fondre dans une
collectivité, qu’elle soit sociale,
politique ou religieuse. Le
« moi » représente
donc la valeur suprême. On peut ainsi dire
que Stirner défend un égoïsme absolu.
Si la religion est un facteur d’oppression de l’individu (et l’humanisme est en quelque sorte de dernier avatar de l’aventure religieuse de l’homme), l’État reste son le principal ennemi. Selon Stirner, l’État n’a jamais eu qu’un but : borner, lier, subordonner l’individu, l’assujettir à une quelconque généralité. « Il ne dure aussi longtemps que l’individu n’est pas tout dans tout, il n’est que la marque évidente de l’étroitesse de mon Moi, ma limitation et ma servitude » (citation extraite de L’État, par Atila Özer, à l'article « anarchisme »). C’est pourquoi il ne faut pas hésiter à lui substituer la « société d’égoïstes » que Stirner préconise.
Si la religion est un facteur d’oppression de l’individu (et l’humanisme est en quelque sorte de dernier avatar de l’aventure religieuse de l’homme), l’État reste son le principal ennemi. Selon Stirner, l’État n’a jamais eu qu’un but : borner, lier, subordonner l’individu, l’assujettir à une quelconque généralité. « Il ne dure aussi longtemps que l’individu n’est pas tout dans tout, il n’est que la marque évidente de l’étroitesse de mon Moi, ma limitation et ma servitude » (citation extraite de L’État, par Atila Özer, à l'article « anarchisme »). C’est pourquoi il ne faut pas hésiter à lui substituer la « société d’égoïstes » que Stirner préconise.
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