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En quel sens peut-on parler d'une perception de soi ?

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La perception est habituellement considérée comme faculté première, dès qu’il s’agit d’appréhender le monde extérieur. Du point de vue du processus de connaissance, elle est donc définie comme une interaction entre un sujet (qui perçoit) et un objet (qui est perçu). Parler de « perception de soi » revient en ce sens à se percevoir soi-même comme objet. L’opération semble difficile, dans la mesure où le sujet, pour se percevoir lui-même, devient à lui-même son propre objet : celui qui perçoit est en même temps ce qui est perçu. La question se pose alors de savoir si, à travers la perception que nous avons de nous-mêmes, nous pouvons avoir accès à une connaissance de nous-même.
Mais la perception peut également être considérée sous l’aspect de la « conscience de soi », dans la mesure où la « perception de soi » est équivalente à la conscience de soi. Ainsi, lorsque Descartes affirme : « je suis, j’existe » (ego sum, ego existo), il atteste de cette conscience de soi.

La perception de soi, aujourd’hui, s’est « naturalisée ». Que cela signifie-t-il ? La communauté scientifique estime, en effet, que les processus de connaissance (qu’étudient les sciences cognitives) sont perceptibles dans le cerveau ; les progrès de l’imagerie médicale font que nous pouvons directement observer ces processus, qui seraient donc « naturels ». L’esprit, ou le cerveau, est devenu l’objet d’étude des neurosciences. La conscience de soi, à ce titre, appartiendrait désormais davantage aux neurologues et aux biologistes qu’aux philosophes.

1. La perception de soi et la perception du monde
a. Le sujet perçoit l'objet
La perception dépend d’une interaction entre le sujet qui perçoit et le monde qui est perçu. Cela sous-entend, dans un premier temps, et en un certain sens, une activité du sujet, et une passivité de l’objet. Dans un second temps, nous devrions établir une distinction entre la perception à proprement parler et la sensation, du point de vue, précisément, de la passivité ou de l’activité du sujet. La sensation relève davantage d’un sentiment ; nous le subissons. La perception au contraire, est active, et englobe la sensation ; « percevoir », étymologiquement, vient du latin percipere, qui signifie « récolter ». La perception « récolte » les sensations, les ordonne, en produit une sorte de synthèse, même si le processus reste inconscient. Percevoir, ce n’est donc pas seulement « sentir » ; la perception correspond à une sorte de « jugement » spontané sur tout ce que nous sentons, voire à une opération intellectuelle. La thèse dite « intellectualiste » soutient, précisément, que l’acte de percevoir est un acte de l’intelligence.

b. La thèse cartésienne
Platon (427-347 av. J.-C.) montre, dans le Théétète (184b, 185c), à travers un dialogue entre Socrate et Théétète, qu’à chacun de nos sens correspond une faculté, liée elle-même à un organe : nous entendons grâce à la faculté de l’ouïe, nous voyons grâce à la faculté de la vision ; l’oreille ne nous permet pas de voir, et l’œil ne nous permet pas d’entendre. Et pourtant l’unité entre les différentes sensations se fait. Cette unité est réalisée par la perception qui englobe donc l’ensemble des sensations. Et la faculté de percevoir, montre Socrate, n’est pas liée à un « organe corporel » ; elle est liée à l’« âme ». C’est en quoi, on peut dire que selon Socrate, la perception est d’origine intellectuelle, et non corporelle.

D’une autre manière Descartes (1591-1650), dans l’analyse du morceau de cire (Seconde Méditation des Méditations métaphysiques) montre que nos sensations ne sont pas capables, à elles seules, de nous faire accéder à la connaissance de l’objet, même si nous avons recours à l’imagination. « Si l’on examine un morceau de cire tiré de la ruche, nos sensations nous donnent un certain nombre d’informations sur ce morceau de cire : […] il n’a pas encore perdu la douceur du miel qu’il contenait, il retient encore quelque chose de l’odeur des fleurs dont il a été recueilli ; sa couleur, sa figure, sa grandeur, sont apparentes ; il est dur, il est froid, on le touche, et si vous le frappez, il rendra quelque son. Si nous approchons le morceau de cire de la flamme, nous observons que […] sa saveur s’exhale, l’odeur s’évanouit, sa couleur se change, sa figure se perd, sa grandeur augmente, il devient liquide, il s’échauffe, à peine le peut-on toucher, et quoiqu’on le frappe, il ne rendra plus aucun son. » Ses qualités sensibles se sont modifiées : si nous nous fions aux perceptions sensibles que nous avons recueillies, nous jugerons qu’il ne s’agit plus du même morceau de cire ; et pourtant, la raison nous dit qu’il s’agit bien de la même cire. C’est donc par l’intermédiaire de l’intellect, et non par celui des sensations ou de l’imagination (qui permettrait d’imaginer quelles pourraient être les multiples qualités d’un morceau de cire), que nous connaissons la nature de l’objet que nous examinons.
L’analyse du morceau de cire est représentatif de la perspective dualiste qui est celle de Descartes : nous sommes constitués d’une âme et d’un corps. La sensation et l’imagination sont liées au corps, et leur importance est seconde, s’il s’agit d’arriver à quelque connaissance vraie. C’est principalement par l’âme (par l’intellect) que nous y parvenons.

2. La perception de soi dans l'optique dualiste
a. Être certain de son existence, c'est être certain de sa pensée
S’il est possible de douter de l’existence des corps, il est impossible de douter de l’existence de l’âme. Telle est la conclusion à laquelle parvient Descartes dans la Seconde méditation. En effet, contraint de douter de l’existence de toutes les choses qui ont besoin d’être perçues pour que la réalité de ces choses soit attestée, Descartes trouve finalement la « certitude première» qui fait l’objet de sa recherche. « J'ai déjà nié qu'il n'y avait rien du tout dans le monde ; qu'il n'y avait aucun ciel, aucune terre, aucuns esprits ni aucuns corps ; ne me suis-je donc pas aussi persuadé que je n'étais point ? ».
Descartes arrive finalement à la conclusion selon laquelle il est impossible que je ne sois pas, puisque je suis capable de penser l’inexistence des choses qui semblent exister. Être certain de son existence, c’est donc être certain de sa pensée : la proposition « je suis, j'existe » est nécessairement vraie, toutes les fois que je la prononce ou que je la conçois en mon esprit. Certes, l’homme est constitué de ce « tout » que forme l’union de l’âme et du corps, et « se percevoir », c’est aussi percevoir que je suis constitué d’une âme et d’un corps ; mais la seule chose dont je ne puisse douter, c’est de l’existence de l’âme.
C’est en sens que la perception certaine de soi équivaut, chez Descartes, à la perception de l’existence de l’âme, même s’il ne s’agit plus alors, au sens où Descartes lui-même a pu la définir, d’une « perception », mais d’une conscience de soi. Cogito ergo sum : « je pense, donc je suis » ; par la pensée, j’accède à la conscience d’être.
b. La perception de soi est au contraire incertaine
Spinoza (1632-1677) va s’opposer à Descartes, en affirmant que « l’âme et le corps sont une seule et même chose, qui est conçue tantôt sous l’attribut de la pensée, tantôt sous celui de l’étendue » (Ethique, Livre III, Proposition II, scolie). Spinoza tente en quelque sorte de réhabiliter le corps. En cela, ce philosophe ouvre de nouvelles perspectives : nous ignorons « ce que peut le corps ». Nous ne saurions en fait pas davantage ce que « peut » l’esprit. Spinoza refuse de penser, comme le pense Descartes, que la pensée est transparente à elle-même. La perception de soi est, en ce sens, incertaine.

Conclusion
L’époque moderne, avec Descartes et Spinoza, circonscrit la perception de soi et la perception du monde dans un cadre bien particulier. La phénoménologie, au 20e siècle, en partant du principe que « se percevoir, c’est percevoir le monde », va en quelque sorte « rénover » ce principe de la perception, en faisant de l’intentionnalité, terme utilisé par Husserl (1859-1938), le concept central de cette partie de la philosophie que l’on nomme la « phénoménologie ».

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