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Gargantua : les thèmes

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Objectifs :
Découvrir les thèmes majeurs de l’œuvre, les problématiques de la pensée humaniste.
Les citations et pages font référence à l’édition : François Rabelais, Gargantua, texte original et translation en français moderne par Guy Demerson, Edition Seuil, Collection Points.

Gargantua fait suite au premier récit de Rabelais : Pantagruel alors que ce dernier est le fils de Gargantua. Il relate l’enfance du géant, de sa naissance à son accomplissement intellectuel, moral et guerrier.

Au-delà du nombre de chapitres qui constituent autant d’entités narratives indépendantes, le roman propose une certaine continuité au fil des épisodes, tissant des liens thématiques, des images, des réflexions humanistes… Une lecture thématique s’avère éclairante quant à l’idéal humaniste de Rabelais qui se cache derrière les épisodes les plus divers, du banquet à la construction d’une abbaye.
1. L'éducation
Gargantua suit deux modèles d’éducation diamétralement opposés :
a. L'éducation médiévale
Grandgousier confie l’éducation du jeune Gargantua à des docteurs sophistes : Thubal Holoferne puis Jodelin Bridé (Chapitres 10-13). Ce système éducatif est un héritage du Moyen âge : l’éducation scolastique traditionnelle. Cet enseignement pratiqué à partir du 11e siècle privilégiait l’acquisition d’un savoir livresque qui éclaire la foi chrétienne sans réel rapport avec la vie concrète, et sans solliciter la raison. Dans Gargantua, Rabelais singe l’enseignement médiéval en ce qu’il présente de sclérosé et déséquilibré.

Critique d’un savoir quantitatif et purement formel

Un savoir qui privilégie la quantité à la qualité, la performance d’une mémoire, sans raisonnement. Le savoir livresque amalgame des manuels et références futiles (grammaire archaïque, textes juridiques caduques ; manuels futiles sur le « bien servir à table » …) et repose sur une mémoire mécanique « à l’endroit et à l’envers ».

Critique du mépris de l’hygiène et du corps réduit à ses instincts les plus animaux
Critique qui passe par la goinfrerie dès le lever, l'abus du vin, l'excrétion, la paresse. Les précepteurs méprisent le corps : il n’est nullement sollicité puisque la passivité est de rigueur (lorsque le géant n’étudie pas, il se prélasse ou écoute, recevant passivement).

Critique de l’inefficacité des moyens mis en œuvre 
Par la longueur exceptionnelle (54 années) emblématique de son inutilité, l’absence de lien avec la réalité concrète et l’abrutissement final du géant réduit aux larmes face à l’éloquence d’un jeune page éduqué selon les principes humanistes.
b. L'éducation humaniste : « mens sana in corpore sano »
Ponocrates propose une toute autre méthode (chapitre 21), fondée sur :

Un bon emploi du temps, basé sur le respect du rythme naturel de l’homme
Chaque instant, l’élève est stimulé pour atteindre une érudition complète : des sciences aux arts, de la religion à l’exercice physique.

Un savoir humaniste basé sur les belles lettres de l’antiquité greco-latine
Une bibliographie fondamentale. L’élève découvre les sciences nouvelles universelles (astronomie, médecine, biologie et la connaissance du monde…) ; les activités humaines (l’artisanat, les métiers…) ; une lecture interprétative rendant la Bible intelligible… La quête d’un savoir encyclopédique est une gloire en faveur du monde en progrès, une confiance en l’homme et ses capacités.

Doc. 1. L'éducation de Gargantua,
gravure de Gustave Doré 19e siècle

La discipline du corps
Elle commence par un respect rigoureux de l’hygiène, de la diététique toute relative, de l’exercice physique. La formation complète répond à un idéal humaniste d’un esprit sain dans un corps sain, un idéal vers lequel il faut tendre, un idéal en rupture avec le passé.

Le bilan 
Le sujet étudiant est actif et constamment sollicité (l’exercice de la raison stimulé par la diversité des apprentissages ; la pratique par l’expérimentation directe ; le contact avec la réalité sociale, professionnelle, culturelle… )
Sous le couvert de l’exagération burlesque se dessine un idéal d’éducation humaniste qui sera repris dans l’utopie de Thélème.
2. La guerre
L’épisode de la guerre picrocholine présente une démonstration idéologique en défaveur de la guerre de conquête, en faveur de la guerre défensive et la volonté de pacifisme.
a. La guerre de conquête et la démesure
La parodie du récit épique et la démesure du geste guerrier
Par les exploits guerriers de Frère Jean des Entommeures (répondant au thème du gigantisme par l’extraordinaire force de ses coups et la démesure de sa puissance digne des héros de l’Iliade), Rabelais dénonce le non respect des hommes et du sang versé, même lorsqu’ils renoncent, expient, se retirent. Le prêtre s’avère davantage un guerrier qu’un moine, capable d’un extraordinaire massacre commentant avec jubilation les blessures et corps dépecés. La prolifération du langage (multiplication des verbes d’hyperactivité ; l’abondance des descriptions) introduit le thème de la démesure avec humour mais en dénonçant cependant la violence d’une défense n’épargnant personne.

La violence et la déraison d’une guerre de conquête 
La violence et la folie de la conquête sont incarnées par Picrochole : il multiplie les exactions et injustices même envers ses sujets. Il est soumis à la violence de son caractère comme le souligne l’onomastique (« Picrochole = bile amère »). Il incarne ainsi l’homme politique agresseur, la politique de guerre de conquête telle que la menait Charles Quint. Le jugement est alors sans appel puisqu’à la démesure de l’ambition répond la démesure de la défaite : le roi est destitué de son trône.
b. Le pacifisme et la mesure
La mesure 
Les géants incarnent paradoxalement la mesure et l’esprit pacifique. Ils multiplient les négociations et offres pour apaiser. Lors de la victoire, les rois sont capables de clémence, de pardon, de générosité. L’objectif premier est le retour à la situation initiale :

- Préserver la paix à tout prix : le roi s’investit d’une mission qui va de la tentative de dialogue à l’achat de la paix à tout prix. L’investissement de Grandgousier est avant tout d’ordre intellectuel : il veut « comprendre » et « apaiser », « modérer ».

- Guider vers la réflexion et le sens du devoir. L’humaniste est investi d’une mission divine qui n’est pas de donner acte de l’existence de Dieu mais le sentiment du devoir et d’un retour sur sa fonction ; et l’exercice de son esprit critique sans céder aux pulsions.
D’une volonté de pacifisme, la guerre est parfois inévitable. C’est le thème d’une réflexion de l’époque que celui de « la guerre juste ».

La guerre est « juste » et morale face à la méchanceté et l’injustice

La lettre de Grandgousier envers Gargantua est un modèle de justification de la guerre utile et nécessaire. Elle a pour but la restauration de la paix, en préservant les hommes. Implicitement, se lit un éloge de François 1er et d’un prince défenseur de la paix puisqu’éclairé par les idées humanistes.

L’opposition de Grandgousier et Picrochole symbolise ainsi l’opposition des humanistes aux forces de récession que sont l’église, la Sorbonne et les conservateurs.

3. La religion
a. Critique de la religion
L’aspect formel de la religion 
Les hymnes liturgiques et les recueils de sermons évacuent toute interprétation et compréhension, tout effort intellectuel. La répétition est des messes à outrance conduit à « expédier » les prières au plus vite en les « marmonnant » dans un langage mêlé de latin incompréhensible ou d’un jargon scolastique inintelligible. Les prêches s’éloignent de la vraie vocation de la parole qui est une communication claire, efficace. La critique va jusqu’au burlesque en vouant le texte liturgique à une fonction soporifique et vomitive, liée au bas corporel, inversant donc la valeur d’élévation spirituelle.
     
L’image du moine traditionnel

Cette image est renversée par celle de Frère Jean des Entommeures qui s’inscrit dans la réalité guerrière. Les moines étaient taxés de paresse, sous le couvert des prières répétées à plusieurs « heures » de la journée, et taxés de couardise sous le couvert d’une exclusion du monde austère.

Doc. 2. Frère Jean des Entommeures combattant les soldats de Picrochole

La critique du pèlerinage
La présence des pèlerins au fil de la narration n’est pas anodine ni digressive. Ils sont menacés d’engloutissement, puis de mort et enfin sauvés par le roi. Les épisodes sous-tendent une critique du pèlerinage inutile puisque frôlant l’anéantissement de l’être ; comme une exclusion du seul réel concret dont il convient de ne pas s’extraire : la sphère privée et familiale…
b. Esquisse d'une utopie
Derrière la proposition d’une anti-abbaye utopique, Rabelais évacue et dénonce les contraintes liées au vœu monacal pour proposer un idéal humaniste (Le luxe et le raffinement évacuent le vœu de pauvreté, le faste des banquets rabelaisien évacue le vœu de privation ou de carême ; le mariage possible celui de chasteté et l’érudition humaniste celui d’ignorance...)
L’idéal humaniste est compatible avec une conception de la religion qui tient compte de la réalité de l’homme, de sa nature profonde.
4. Le banquet
a. L'omniprésence de la nourriture et de la boisson
Tout est placé sous le signe festif du banquet : la dédicace du prologue aux « buveurs illustres » ; la naissance du héros éponyme ; le cri de la naissance réclamant « à boire » ; les leçons durant les repas ; le repas offert aux guerriers ; la liberté de l’appétit dans l’abbaye…
L’omniprésence de la démesure carnavalesque instaure un esprit bachique (lié à Bacchus, Dieu de la fête, de l’ivresse) comme une provocation bouffonne. Le langage sert cependant à exprimer un esprit humaniste, ouvert sur la vie. De l’excès de nourriture, nait Gargantua. Des débordements naît une utopie qui est aux antipodes de la rigueur stérile de la Sorbonne ou de l’esprit gothique du Moyen âge.
b. Le « bas corporel » (l'œuvre de François Rabelais, Mikaïl Bakhtine)
Les allusions au sexe et aux excréments sont présentes dans tous les récits rabelaisiens : le sexe est porteur de vie, de mort, permettant le renouvellement. Ainsi, l’homme est dévoreur de vie qui retourne à la terre. Les excréments illustrent un cycle de vie, de l’ordure qui tue (L’urine dévaste et noie) vers la promesse d’un renouveau (naissance et victoire sur l’ennemi).
c. Le rire est le propre de l'homme
Le rire permet d’accepter l’inacceptable
La dimension carnavalesque permet d’atténuer le scandale de la vie ou de sa démesure (comme la noyade des adversaires sous le flot d’urine de la jument ; le dépeçage des ennemis par Frère Jean ; le massacre de l’aide de camp de Picrochole ou de sa jument sous un excès de colère…).

Le rire du carnaval est libérateur et constructeur 
Il lutte contre les ignominies officielles (l’esprit de conquête ; la rigueur ascétique de la Sorbonne). L’euphorie autorise alors l’expression d’un idéal humaniste à lire en sous-teinte, comme nous y invite le prologue. Elle conteste l’esprit de sérieux qui étouffe l’intelligence nouvelle de la Renaissance, dans un rire populaire qui révèle une sagesse bien plus profonde.
L'essentiel
L’étude des thèmes soulève la problématique de l’œuvre ainsi que la réception très contestée qu’elle a eue : une condamnation de grossièreté gratuite ou un manifeste de l’esprit humaniste.

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