L'art peut-il se passer de référence au beau ?
Savoir si l'art peut échapper au concept de beauté
- L'art est lié au beau car ils sont tous deux soumis au plaisir désintéressé.
- Cependant, le concept de beau est subjectif et non normé.
- De plus, l'art ne doit pas être pensé qu'en rapport avec le beau : il est aussi outil et expérimentation.
La connaissance est orientée vers la recherche du vrai, la morale consiste dans la recherche du bien, mais quelle est la norme qui définit l'art ? Traditionnellement, on définit l'art par référence au beau. Le beau est le critère grâce auquel on distingue l’œuvre d'art des autres productions humaines et grâce auquel on juge de la qualité d'une œuvre particulière. Mais le beau n'est pas le propre de l'art : le spectacle de la nature révèle souvent une beauté extraordinaire. De plus, certaines œuvres d'art ne sont pas orientées vers la recherche du beau et elles ne perdent pas pour autant leur valeur artistique. Par conséquent, ne doit-on pas, dans un souci de pertinence, défaire le lien traditionnel qui unit l'art et le beau ?
L'art semble inévitablement lié à l'idée de beau. En effet, quand on dit d'un objet qu'il est une œuvre d'art, on lui attribue une valeur (« c'est de l'art », « ce n'est pas de l'art »). Toutefois, les appréciations que nous portons sur l’œuvre, ou sur l’objet produit qui prétend au statut d’« œuvre d’art », dépendent en grande partie du plaisir ou de la satisfaction que nous éprouvons à les contempler. Le beau et l'art ont donc une problématique commune : le plaisir. Comme le montre Kant, l'art est affaire de goût, or : « le goût est la faculté de juger un objet ou un mode de représentation par la satisfaction ou le déplaisir d'une façon toute désintéressée. On appelle beau l'objet de cette satisfaction ». Le beau est donc une qualité que nous attribuons aux œuvres d'art pour exprimer le plaisir que nous éprouvons à leur contact. On ne saurait dans cette optique penser l'art sans référence au beau.
Le beau ne se manifeste pas seulement dans l'art. Nous pouvons ainsi être frappés par la beauté de certains paysages ou encore par la beauté du chant d'un oiseau. Le beau ne serait donc pas un élément suffisant pour caractériser l'activité artistique. Selon Hegel, le beau artistique ne doit être confondu avec le beau naturel. « La beauté artistique est la beauté née de l'esprit », écrit-il, et c'est en cela qu'elle se distingue de la beauté naturelle et qu'elle la surpasse. Le beau artistique dépasse l'ordre de la nature puisqu'il traduit dans l'ordre du sensible ce qui relève de l'esprit.
Cependant, ce lien de l'art et du beau est fragile parce qu'il n'existe pas de concept déterminé du beau. Chacun peut se rendre compte du fait que l'idée du beau a varié selon les cultures et les époques. Ainsi nous pouvons aujourd'hui rester insensible à la beauté qui se dégage d'une peinture du Moyen Âge. Les codes esthétiques alors en usage ne correspondent plus à ceux qui ont cours dans nos sociétés. De plus, l'art connaît des révolutions parce que les artistes de génie ne se plient pas à une conception établie de la beauté. Lorsque Picasso peint Les Demoiselles d'Avignon (1907), il bouleverse l'idée du beau. Par conséquent, la référence de l'art au beau est discutable parce qu'aucune norme ne permet de définir le beau artistique.
L'art ne se définit pas toujours par référence au beau. Il peut être caractérisé plus profondément par sa relation au sacré ou encore par son engagement pour la vérité. L'Archipel du goulag (1973) de l'écrivain russe Alexandre Soljenitsyne n'est pas essentiellement animé par le souci formel du beau. Il s'agit plutôt d'explorer par les moyens propres de l'art la vérité d'une situation politique et humaine spécifique. L'artiste est alors un révélateur, selon le mot de Bergson, et l'art est un outil de connaissance.
Au XXe siècle, l'art est devenu le lieu d'expérimentations de plus en plus audacieuses et le souci du beau semble avoir été sacrifié à ces recherches. Le développement de l'art abstrait, par exemple, a pu conduire au tableau si déroutant, puisqu'il ne représente rien, du peintre russe Malevitch (1878-1935), Carré blanc sur fond blanc (1919-1920).
Certaines tentatives de l'art du XXe
siècle visent explicitement à
défaire le lien historique de l'art et du beau.
L'art ne doit pas être au service de
l'idée du beau. C'est ainsi qu'on peut
définir le mouvement
« ready-made »,
initié par Marcel Duchamp : Fountain
(1917) constitue une véritable provocation
vis-à-vis de la conception traditionnelle de
l'art puisqu'elle représente un urinoir à
l'envers. Duchamp, à travers ce geste, estime
notamment qu’il suffit, pour qu’un objet
accède au statut d’œuvre
d’art, que l’artiste décide
qu’il en soit une. Il bouleverse ainsi non
seulement l’idée que nous nous faisons du
beau, mais aussi celle que nous nous faisons de la
création artistique.
Cependant, d'une certaine manière, on pourrait
dire que l'art conserve toujours une
référence au beau : qu'on ait une
conception de l'art en adéquation avec la
beauté ou bien en rupture avec elle, l'art se
définit toujours par rapport au beau,
positivement ou négativement.

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