Les limites de la bureaucratie
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« Nous avons vu que la structure bureaucratique, exerçant une pression constante sur le fonctionnaire, l’oblige à être méthodique, prudent et discipliné. Dans une véritable bureaucratie, on est donc en présence d’une grande régularité de comportement et d’un haut degré de conformité aux types d’action prescrits. Il s’ensuit qu’on donne une importance fondamentale à la discipline, aussi développée dans une bureaucratie religieuse ou économique que dans l’armée » Roberte Karl Merton, Eléments de théorie et de méthode sociologique, 1965.
Si Max Weber a fait de la bureaucratie le symbole de la raison moderne tant dans les organisations administratives que dans les entreprises, la fin de la modernité va sonner le glas des systèmes bureaucratiques. La bureaucratie va devenir symbole d’inefficacité, voire être perçue comme une menace pour la démocratie à tel point que le terme même va prendre une connotation péjorative. C’est dans son fonctionnement propre que certains auteurs vont en noter les contradictions et mettre en avant ses incapacités à remplir les fonctions qui lui sont attribuées. Le « phénomène bureaucratique » va devenir un objet d’études pour les sociologues.
Selon l’expression de Michel Crozier, dans son ouvrage Le phénomène bureaucratique publié en 1963, la bureaucratie constitue « le legs paralysant d’un passé où prévalait une conception étroite et bornée des moyens de coopération entre les hommes ». Michel Crozier n’est pas le premier à s’intéresser à cette question. Il est possible de remonter à l’École des relations humaines avec Elton Mayo pour découvrir les limites de l’organisation bureaucratique.
Lorsqu’en 1927, Elton Mayo et son équipe de chercheurs s’intéressent au fonctionnement des ateliers dans l’entreprise Western Electric à la demande de ses dirigeants, ils découvrent que le taylorisme rencontre des limites sérieuses de fonctionnement en raison de sa lourdeur bureaucratique. La motivation des salariés est souvent réduite à sa plus simple expression car les individus dans cette organisation du travail ne reçoivent pas la reconnaissance sociale nécessaire. Les instructions dispensées par les supérieurs hiérarchiques sont souvent mal, voire pas du tout, comprises. La sollicitation intellectuelle des salariés étant inexistante, l’implication dans les tâches effectuées est souvent absente et réduit du même coup la productivité du travail.
En 1965, Robert K. Merton dans son ouvrage Éléments de théorie et de méthode sociologique, va révéler les travers du fonctionnement bureaucratique. Le degré important de conformité dans les procédures administratives des bureaucraties conduit les agents de cette organisation à adopter des comportements rigides et ritualistes et qui les placent dans l’incapacité de réagir et de s’adapter aux situations nouvelles. Les moyens deviennent des fins en soi et l’organisation justifie son existence par ses moyens et non par les fins qu’elle devrait chercher à atteindre. Les acteurs de la bureaucratie s’enferment alors dans des comportements dénués de sens, et en perdant de vue les objectifs à atteindre finissent par adopter des attitudes passives et routinières.
Michel Crozier, en réutilisant les principes de la rationalité limitée (cf. fiche « La rationalité limitée ») développée par Herbert Simon, va mettre en avant le caractère particulièrement contreproductif du modèle d’organisation bureaucratique. Les comportements routiniers conduisent à des difficultés de communication entre les différents niveaux hiérarchiques. Les publics en rapport avec ces organisations sont incapables d’en saisir la logique de fonctionnement et se perdent souvent dans des rouages et des procédures inutilement complexes qui ne servent qu’à maintenir le pouvoir des acteurs. La mauvaise circulation de l’information conduit à occulter les problèmes et les paramètres nécessaires à une prise de décision efficace. En l’absence de transparence de l’information, des tendances au népotisme et à l’autoritarisme se multiplient.
En 1977, Crozier publie « L'acteur et le Système » en collaboration avec Erhard Friedberg, ouvrage dans lequel ils mettent en évidence l’écart important qui peut exister entre la complexité des comportements humains et la rationalité affichée par les organisations. Le besoin de liberté l’emporte souvent sur la rationalité et conduit les individus à se battre contre le système. Dans une organisation, les individus sont ainsi amenés à construire des stratégies offensives pour saisir les opportunités offertes par le système, et défensives quand il s’agit de protéger leur position et d’échapper aux contraintes.
Si la vision de Hegel faisait du fonctionnaire un « héros discret des temps modernes », et de la bureaucratie « le triomphe de l’égalité et du progrès », les expériences politiques du 20e siècle ont conduit à remettre en cause ce positivisme.
• Les expériences des régimes autoritaires et totalitaires (nazisme, stalinisme) vont devenir les manifestations de l’absurde voire de la mise en œuvre d’une bureaucratie ayant pour fin la négation de l’humanité. Hannah Arendt, philosophe et politiste, met en évidence dans son analyse sur les « origines des systèmes totalitaires » l’importance du phénomène bureaucratique. Lorsqu’elle s’intéresse au procès du nazi Eichmann, elle explique son comportement par le fait qu’il fut un « employé modèle et un bureaucrate méticuleux ». Cela signifie que la bureaucratie peut devenir une machine au service des entreprises de génocide et de crimes contre l’humanité. Les œuvres littéraires de Franz Kafka (Le Château) ou bien encore de George Orwell (1984) vont elles aussi traduire l’absurdité des systèmes bureaucratiques et le danger qu’ils représentent pour la démocratie.
• Dans leur analyse sur « Les héritiers », Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron vont faire la démonstration que l’organisation bureaucratique a permis la constitution d’un nouveau processus de reproduction sociale et d’une nouvelle catégorie privilégiée par le niveau d’études (noblesse d’État : grands corps de la fonction publique). Les valeurs propres aux grands fonctionnaires en font un groupe à part dans la société et génèrent des risques de ploutocratisation de l’administration, de constitution d’une république des experts.
La bureaucratie a constitué avec Weber le symbole même du triomphe de la raison dans les sociétés modernes. Cependant, avec le développement des organisations et la découverte progressive de leurs limites de fonctionnement, la bureaucratie est devenue synonyme d’inefficacité. La structure bureaucratique elle-même est source de dysfonctionnements en raison de ses rigidités intrinsèques et des comportements des acteurs. De plus, l’expérience politique a conduit à faire de la bureaucratie une menace pour la démocratie.
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