La bureaucratie : la rationalité de la modernité
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« Le type le plus pur de domination légale est la domination par le moyen de la direction administrative bureaucratique. Seul le chef du groupement occupe la position de détenteur du pouvoir soit en vertu d'une appropriation, soit en vertu d'une élection ou d'un successeur désigné. Mais ses attributions de détenteur du pouvoir elles-mêmes constituent des «compétences» légales. » Max Weber, Économie et Société, 1922.
La bureaucratie comme le capitalisme, constitue pour Weber une expression importante de la matérialisation de la rationalité dans les sociétés occidentales modernes. La bureaucratie comme mode d’organisation du pouvoir de l’Etat suppose un certain nombre de caractéristiques. Il faut souligner cependant que la bureaucratie pour Weber ne se cantonne pas exclusivement à l’administration publique mais s’étend aussi au fonctionnement des entreprises dans le cadre du capitalisme de marché. Il en souligne d’ailleurs les vertus dans les sociétés modernes.
• Le processus de rationalisation des
activités humaines dans les sociétés
occidentales fait naître un nouveau mode
d’organisation du pouvoir de
l’État qui repose sur une
légitimité rationnelle
légale : la bureaucratie. La
légitimité légale rationnelle peut
se définir comme la mise en œuvre de la
rationalité en finalité
combinée avec la rationalité en
valeurs. Les fins justifient les moyens qui sont mis
en œuvre afin d’atteindre des buts
correspondants aux valeurs sociales reconnues par
la société. L’ensemble des
règles légales (lois et
règlements administratifs) sont ainsi
considérées comme rationnelles et
permettent le fonctionnement de la bureaucratie.
• La bureaucratie et ses agents qui la composent,
les fonctionnaires, sont soumis à un
certain nombre de règles et de
caractéristiques propres à ce mode
d’organisation. En premier lieu, pour assurer
l’existence de la bureaucratie, la
propriété privée et la
propriété collective doivent
être séparées. La bureaucratie
suppose aussi l’existence d’un principe de
liberté d’actions qui suppose que les
fonctionnaires « n'obéissent
qu'aux devoirs objectifs de leur
fonction » (Économie et
Société) c'est-à-dire
qu’ils disposent d’une autonomie dans
leurs décisions. La fonction bureaucratique
n’est pas transmissible. Les fonctions
officielles au sein de la bureaucratie sont de plus
établies de façon
hiérarchique et déterminent les postes
nécessaires à son fonctionnement. La
bureaucratie suppose ainsi une organisation pyramidale
du pouvoir dans laquelle les relations sont
subordonnées à la position du
fonctionnaire. La position dans cette hiérarchie
dépend des compétences des
fonctionnaires liées à la fonction
exercée. Le recrutement des fonctionnaires est
alors basé sur une
« sélection
ouverte » mesurant la qualification
professionnelle et donne lieu à un
contrat. Les fonctionnaires sont soumis à
une discipline stricte et à un
contrôle de leurs activités. Les
règles bureaucratiques doivent
s’appliquer de façon impersonnelle et
font l’objet de procédures
écrites.
« La raison décisive du
développement de l'organisation bureaucratique
était depuis toujours sa supériorité
purement technique sur toute autre forme
d'organisation. » (Économie et
Société).
Selon Max Weber, l’organisation
bureaucratique présente des vertus
spécifiques qui lui confèrent un avantage
certain sur toutes les autres formes
d’organisation, comme par exemple le système
des charges confiées à des personnes
extérieures à l’administration.
« La précision, la rapidité, la non ambiguïté, le maniement des documents, la continuité, la discrétion, l'unité, la subordination stricte, la réduction des conflits, les frais en personnel et en matériel, tout cela est nettement amélioré dans l'administration bureaucratique par des fonctionnaires individuellement instruits » (Économie et Société). On peut résumer ces vertus par l’idée de précision renforcée, par la rapidité d’exécution des tâches et par la continuité de l’action de la bureaucratie. Le changement de fonctionnaire ne doit en rien affecter la bonne marche de l’organisation.
L’intensification des échanges d’informations économiques et politiques nécessitent une organisation administrative sans faille qui permet de répondre promptement aux besoins de la collectivité. Le caractère complexe des sociétés modernes nécessite un mode d’organisation capable de répondre de façon efficace. Weber met en évidence que la division du travail inhérente au fonctionnement bureaucratique, permet la réalisation de « règles calculables » sans lien direct avec les individus. La fonction prime sur l’individu, et les ressorts affectifs en sont exclus. La bureaucratie fait de la rationalité, sa religion moderne en mobilisant des fonctionnaires personnellement désintéressés et empreints d’objectivité. Ainsi « sa [la bureaucratie] nature spécifique, qui est bien accueillie par le capitaliste, se développe d'autant plus parfaitement que la bureaucratie est déshumanisée, qu'elle réussit complètement à éliminer de l'activité officielle l'amour, la haine et tout ce qui, étant purement personnel, irrationnel et émotionnel, échappe au calcul. » (Économie et Société).
La bureaucratie au même titre que le capitalisme, constitue le mode d’organisation des collectivités humaines le plus en adéquation avec le développement de la rationalité. L’analyse de Max Weber conduit à faire de la bureaucratie le mode d’organisation humain le plus efficace car ses caractéristiques permettent l’exercice parfait de la légitimité rationnelle légale. La gestion du bien public passent par des règles précises et fonctionnelles qui s’appuient sur des principes d’indépendance, de responsabilité et d’actions impersonnelles des fonctionnaires qui assurent le bon fonctionnement de la bureaucratie. Weber envisage la bureaucratie comme le mode d’organisation le plus apte à répondre à la complexité des sociétés modernes.
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