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Fin de partie : Les personnages

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Objectifs :
- Synthétiser les lectures de la pièce, avoir une vision d’ensemble des personnages.
- Se préparer à la dissertation sur l’œuvre au programme, sur la notion de personnage théâtral.
- Analyser les personnages : de leur spécificité à l’aspect interchangeable des personnages beckettiens… De la dimension de papier à la représentation de la condition humaine…
Les citations font référence au texte des Editions de Minuit.

Etymologiquement, « personnage » signifie « rôle » (de « personna » en latin).
Le personnage est donc un être qui participe à la fiction, qui incarne un rôle. Cette définition souligne alors le lien entre l’acteur et le personnage qu’il interprète, entre l’être de papier et la psychologie dont il est doté pour vivre sur scène comme entité.
Chez Beckett, une problématique intrinsèque s’immisce dans ces liens puisque ses personnages sont des figures réduites au minimum, vivant dans l’instant de la communication et pourtant, ils sont les représentants de la condition humaine, mimant une interdépendance maladive et des conflits ridicules entre les hommes.
Ainsi, les personnages dans Fin de Partie ont une dimension toute particulière.
1. Présentation des personnages
a. Le couple maître-valet
Hamm : le maître
- Portrait physique : De son identité physique, nous ne connaissons que son handicap. Hamm est un homme aveugle, paralysé, cloué sur son fauteuil d’handicapé et donc totalement dépendant de son valet : Clov.
Hamm est au centre de la scène, déplacé de case en case, pour revenir au centre : comme le roi d’une partie d’échec, qu'il faudrait mettre mat dans une partie qui n'arrive pas à se conclure et qui n’en finit pas… Hamm trône au centre dans son fauteuil tel un roi, démiurge (dieu créateur de l’univers chez les platoniciens) sadique régnant sur son monde malmené.

- Son nom : n’est pas une simple dénomination hasardeuse.
« Ham » en anglais signifie « jambon », ce qui pourrait faire référence à un tas de chair inerte et sans vie. Cela signifie également « cabot, cabotin » donc un acteur qui veut attirer l'attention du spectateur sur lui
plutôt que servir son rôle. Le personnage est très théâtral : il a, en effet, un besoin constant d’attirer l’attention sur lui en jouant l’acteur. Il récite son roman, exprimant ses propres didascalies, il s’envole dans des élans lyriques emphatiques, s’abandonne à des remarques excessivement acerbes… Il faut également noter que ses propos ouvrant et fermant la pièce sont du méta-théâtre (le théâtre dans le théâtre), puisque l’acteur prend parole et la rend en disant : « A moi. De jouer. » Il est le personnage qui attire les pleins feux sur son excès, sur sa vie qui s’étiole…
De plus « Hamm » peut être considéré comme un diminutif de « Hammer » qui signifie «  marteau », à savoir l’instrument violent qui enfonce les clous. (Remarquons la proximité phonétique avec le nom « Clov »). Le personnage serait alors le maître de ballet, l’instrument d’une violence qui « enfonce » les autres.

- Activités : Hamm emplit ses journées de rituels futiles qui annihilent le sentiment d’urgence et de mort. Hamm tyrannise son entourage, en exigeant le silence, puis l’écoute, l’ouverture des fenêtres, l’observation, la promenade dans la pièce, le médicament… Tout est prétexte à un ballet d’ordres dans l’optique de contrôler tout son environnement, pour ne pas admettre qu’il ne contrôle absolument rien en lui, en sa vie.

- Obsessions :
Hamm a peur de la solitude et veut garder le contact avec autrui, coûte que coûte, pour éviter le silence d’où son obsession pour un rituel qui cadence ses journées. Il échappe au vide par ses questions et ordres, auxquels il attend une réponse dans l’indétermination, pourvu que « ça avance » (p. 29) dans le flou, comme la vie qui se déroule inconsciemment.
Hamm est effrayé par tout élément qui perturbe son rituel, son illusion de vie : la présence du rat, les morpions, l’enfant qui survient en fin de partie… Tout ce qui rappelle la vie est banni. Le personnage semble s’accrocher à un rêve illusoire de délivrance de la vie, il envisage un avenir coupé de la réalité comme l’aboutissement de son attente : « dans le vieux refuge. Seul contre le silence » (p. 78).

Clov : le serviteur

- Portrait physique : De son physique, on ne connaît qu’une démarche gênée, entravée par l’incapacité à s’asseoir. Clov est donc le personnage voué à tourner en rond, en claudiquant sur cette scène, figé en apparence dans des postures d’observation impassibles. Le repos lui est interdit, comme tenu dans une soumission à son maître.

- Son nom : Il est possible de lire « clou » dans ce nom, et il deviendrait celui soumis aux coups de marteau.

- Activités : Clov est le serviteur de Hamm. Celui-ci a adopté Clov, devenant une figure de père qui rappelle vaguement celle de l’histoire inventée par Hamm (cf. fiche de cours « Liens d’interdépendance et conflits »). C’est un être de supplice : condamné à obéir, à avoir mal aux jambes et aux yeux, pousseur de chaise, et servant d’yeux, son existence n’a pas de sens. Il exécute, même en râlant, les ordres de Hamm et commente : « Je ne sais pas pourquoi je le fais ».
Clov est le garant du temps qui passe, marquant le moment des rituels : l’heure du calmant, de l’histoire, du lever… Il précise si « C’est trop tôt », donne son veto imparable, selon une organisation imperturbable. Clov est l’illusion d’une maîtrise du temps, marquant les heures par ses entrées et sorties, jugeant que le temps a passé pour administrer le calmant : mais la réalité dépasse l’illusion puisqu’il est toujours « la même (heure) que d’habitude ».

- Obsessions : Clov a peur d’une vie cyclique, d’où sa volonté de tuer le rat qui semble se régénérer, l’enfant observé par la fenêtre, qui serait un éventuel « procréateur »… Tous les instants se renouvellent, cycliquement et ne semblent pas vraiment tendre vers une fin d’où l’ « impossible tas » auquel il fait référence au tout début de la pièce.
b. Les parents
- Physique : Nagg et Nell sont les parents de Hamm. Ils sont condamnés à vivre dans des poubelles parce que paralytiques et sans jambes. Ils incarnent la vieillesse, le temps en cours de putréfaction. Pourtant, ils sont doués d'une certaine vitalité : ils communiquent comme ils le peuvent, fermés dans deux microcosmes identiques, séparés mais proches. Ils cherchent le contact de manière visuelle en analysant leurs capacités respectives, de manière auditive, en communiquant à leur manière. Le reste de leur corps maltraité est sollicité pour entretenir un semblant de communication : un échange coupé du reste de la scène.

- Noms : « Nagg » est un diminutif de « Nagel » en allemand qui signifie « clou ou ongle ». Le prénom « Nell » se rapproche lui du mot anglais « nail » qui signifie aussi « clou ou ongle ». Ils sont donc également les souffre-douleur de Hamm, pions qu’il manipule à souhait en exigeant soit leur silence, leur écoute, leur emprisonnement, ou leur mort.

- Activités : Nagg est un personnage pathétique : il est en demande de nourriture, en demande de tendresse, tel un enfant. Il lutte avec force en sollicitant un baiser inaccessible, en rappelant le passé amoureux révolu, en racontant la même histoire. Il lui importe de préserver le lien avec sa femme : que le langage et la tendresse demeurent. Ses efforts s’anéantissent dans le silence et les larmes lorsque son épouse meurt.
Nell est le personnage de la lucidité, résignée à sa condition : baigner dans l’ordure. Elle dit savoir jouer une « comédie », celle d’une vie tragique. Elle fantasme une mort dans la noyade, attirée par le silence, la pureté du blanc… Elle est le seul personnage à interrompre la routine de la journée, puisqu’elle meurt, à moins que sa mort ne s’ensuive d’une résurrection le jour suivant…
2. Dimension particulière des êtres de scène
a. Personnages réduits au minimum : personnages de l'instant de la communication
Les personnages sont presque interchangeables, parce que sans identité précise. Ils tirent leur spécificité de leur infirmité propre, ou de leur prénom, dont le sens relève du même champ sémantique. Les personnages se ressemblent donc dans leur décrépitude, et leur incapacité à évoluer librement.
Ils existent essentiellement par leur parole : l’acte de langage est vie. Le personnage est machine de discours : ils ont besoin de dire même si leurs mots tendent vers la dissolution du personnage parce qu’ils n’ont pas de sens, de logique.

Exemple : le dialogue n’a pas de continuité logique : aux interrogations de Hamm, Clov répond par des propos laconiques, donnant l’impression d’une parole vide, mimant l’atrophie des personnages.
b. Méta-théâtre : personnages acteurs
Méta-théâtre : Le théâtre parle du théâtre, du jeu des acteurs au cœur même de la pièce, cassant ainsi l’illusion théâtrale, la vraisemblance. On parle d’anti-théâtre.

Les personnages théâtralisent leur discours.
Ils montrent le fonctionnement de la réplique de scène : le discours se construit syntaxiquement, dans un jeu de questions-réponse sans logique sémantique. L’illusion d’un dialogue se développe entre les personnages sans construire un sens mais pour que la parole continue d’avancer.
Exemple : (page 81) Hamm et Clov parlent d’une tierce personne : « Il vient à plat ventre ». La suite du dialogue n’éclaircira pas l’identité du pronom mais développera une variation sur un thème ou personnage à jamais mystérieux.

Le théâtre se dévoile dans sa terminologie même, lorsque Hamm évoque l’« aparté », lorsque Nell s’interroge sur cette « comédie » : les personnages disent qu’ils jouent. Ils demandent même un auditoire. Nagg ou Hamm se placent en tant qu’acteurs et travaillent leur jeu d’interprétation : même en fin de partie, Hamm trouve « joli ça », ses efforts poétiques, métaphoriques, son envolée…
L’interlocuteur devient alors spectateur, désignant la scène comme espace théâtral. La mise en abyme du théâtre à l’intérieur même de la pièce casse toute illusion, si infime fût-elle : on se rapproche de l’anti-théâtre. Les personnages exhibent les rouages de la pièce : des rouages qui tournent à vide…
3. Constat cynique de la condition humaine
a. Interdépendance et besoin d'autrui
La solitude est impossible : les personnages ont besoin de l’autre pour exister, comme des instances de langage qui évitent la menace du silence.

Nagg est celui qui préserve le discours avant tout. Il utilise toutes les possibilités que lui offre son corps rabougri et atrophié pour entrer en communication avec sa femme : il demande une tendresse qui en devient risible parce qu’inaccessible ; il en appelle au passé et à la narration, pourvu que le verbe dure... Il interroge ce qu’il reste de leurs corps, il questionne pour obtenir une réponse, il demande pour obtenir une écoute. Il cessera de se manifester quand sa femme meurt : devenant seulement des larmes, dans un univers clos, indépendant de la froideur cynique de la scène.
Dépendre à ce point de l’autre crée des tensions dramatiques et des relations viciées, vicieuses, qui vont de la tyrannie à la haine, de la soumission à la colère…

Hamm et Clov sont emmurés dans leur couple : leurs relations sont réduites à celles de la nécessité et donc de la haine. Nagg et Nell ne pourront se rejoindre : l’un dans le fantasme d’un amour révolu, l’autre dans celui d’une mort à venir.
b. Complémentarité et conflit
Ces relations complexes et perverses, de dominant et dominé ou de non communication et claustration mettent mal à l’aise et préparent à la montée en puissance de la haine. Elle se traduit en propos agressifs et meurtriers : défiance et haine. (Exemple : Clov finit par brutaliser Hamm avec le chien en peluche ; Hamm insulte son géniteur sans retenue : « salopard ! »).
Le huis-clos se métamorphose en ébullition morbide : les relations s’opacifient et sont empreintes d’un désir mortifère (qui blesse, tue, apporte la mort). Se maintient un équilibre de sadisme et de répugnance (exemple : A la mère Pegg qui va « mourir d'obscurité » Hamm refuse le peu d'huile qui entretiendrait sa lampe.)
Conclusion
Beckett traite ses personnages de manière toute originale : chaque être dépourvu d’une identité réelle contribue à donner une vision cynique de la condition humaine. Ils sont en rupture avec le personnage classique dans le sens où il ne se met pas au service d’une parole nourrissant une intrigue, un caractère mais plutôt au service d’une communication en déperdition

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